L'arrivée du train à Toulouse : 1856
Le maire de Toulouse le comte Joseph de Villèle (1773/1854 – maire de la ville Rose entre 1815 et 1818), refuse le chemin de fer au début du siècle alors qu’à cette époque, le rail commence à s’imposer comme symbole de l’industrialisation naissante (la plus ancienne gare de France est celle de Saint-Lazare, 1837 et la 1ère ligne de chemin de fer est construite en 1827 et relie Saint Etienne à Andrézieux sur 21 km de rail).
Ainsi, pendant la première moitié du 18è siècle, faire le trajet Bordeaux-Toulouse demande encore 18 heures de diligence. Si l’on voulait ensuite aller jusqu’à Sète, il fallait rajouter 10 heures de trajet sur le canal du Midi ! => voir cet article
En 1853, les frères et hommes d’affaires bordelais Émile et Isaac Pereire décident de fonder la Compagnie des Chemins de Fer du Midi.
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Le chemin de fer empruntera la rive gauche de la Garonne jusqu’à Langon, puis la rive droite jusqu’à Toulouse. Il passera ensuite par Castelnaudary, Carcassonne, Narbonne, Béziers, Mèze, avant d’arriver à Cette. D’une longueur totale de 481 km, le budget est évalué à 140 millions de francs.
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La question du Canal du Midi est primordiale : que fait on? Certains proposent la concession simultanée du chemin de fer et du canal, d'autres proposent la suppression du canal et l'utilisation de sa plate forme pour y poser des rails ! Le gouvernement donnera finalement son accord pour une concession unique.
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Dès 1855, la section Bordeaux-Valence est ouverte au trafic.
Le 31 août 1856, le site de la future gare de Matabiau est officiellement inauguré, en présence du comte Roguet, représentant l’Empereur Napoléon III, à l’occasion de la réalisation du tronçon Agen-Toulouse par la Compagnie des chemins de fer du Midi : « Tout au long du parcours, des drapeaux, des arcs de triomphe, des attroupements soulignent la solennité du moment » comme l’explique Thierry Bonnafous, auteur de « 1856, Gare Matabiau, le train arrive enfin » (Editions Midi-Pyrénéennes).
En gare de Toulouse, Monseigneur Moliand, l’archevêque de la ville bénit cette « voie nouvelle » tandis qu’Antoine Policarpe, maire de Toulouse de 1855 à 1858, écrit dans son discours : « les habitants accueilleront ce nouveau bienfait dû à la sollicitude de l’Empereur pour tout ce qui rattache au bien-être et à l’avenir des populations méridionales ».
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Tous les détails de cette cérémonie dans « Le Journal de Toulouse » : " Le train d'honneur partir de Toulouse à 7h50. Il comprenait six wagons dans lesquels prirent place les personnalités officielles. Ce train partit au milieu d'un énorme concours de peuple et il passa sous de magnifiques arcs de triomphe, dans les principales communes qu'il traversait. II franchissait la station de Grisolles à 8 h 30 et arrivait à Montauban à 9 heures, Là, le convoi reçut les autorités du département de Tarn-et-Garonne et, s'étant remis en marche, passa à Moissac, à Valence, et arriva à Agen à 10 h 35. Le préfet de cette ville et Mme Ducos offrirent au palais de la préfecture un déjeuner aux invités et le train repartit à 12h10, devant être de retour à Toulouse à 15 heures pour la cérémonie de la bénédiction des locomotives...
A 3 h 30, Mgr Mioland, archevêque de Toulouse, revêtu de la chape d'or et mitre en tête, parut à l'autel entouré d'un nombreux clergé. II prononça un éloquent discours qui fut écouté avec la plus respectueuse attention. Après cela, le cri aigu d'une machine ayant donné le signal, quatre locomotives, ornées de drapeaux et de branches de feuillages, vinrent se placer devant l'autel. Le pontife procéda à leur bénédiction selon les rites de l'Eglise et après le chant du « Domine salvam fac » qu'éxécutèrent les élèves des écoles primaires...
A 17 heures, un banquet de quatre- vingt couverts réunissait au palais de la préfecture les principales autorités, et, à 20 heures une brillante soirée avait lieu au Capitole, dans la salle des Illustres, où la musique du 161, d'artillerie, d'habiles chanteurs, et les élèves du conservatoire se firent tour à tour applaudir. Dès la chute du jour, une brillante illumination « au gaz et à l'huile » faisait resplendir la façade du Capitole. La place était ornée de guirlandes, de lanternes vénitiennes du meilleur effet, et tout cela se prolongeait jusqu'à la gare, par la rue, la place et l'allée Louis-Napoléon (Lafayette)
L'administration du chemin de fer du Midi, ne voulant pas que les pauvres fussent oubliés un tel jour, fit distribuer au bureau de bienfaisance des diverses localités traversées par la section qui avait été solennellement inaugurée une somme de 20.000 francs. Toulouse reçut, pour sa part, la moitié de cette somme. »
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=> Quatre trains circulent désormais quotidiennement dans chaque sens : 3 omnibus et un express sur Bordeaux Toulouse.
Se rajoutent des « trains de plaisir » pour visiter Bordeaux, Toulouse, Bayonne. Voir aussi article sur les loisirs ICI
De nouvelles lignes touristiques sont réalisées : par exemple la ligne de La Teste à Arcachon est inaugurée le 26 juillet 1857 ; dès 1858, la gare voit arriver 140.000 voyageurs pour la plupart fortunés. Tout est fait pour les attirer : le Casino mauresque est construit en 1863, la gare en 1864, le Grand Hôtel érigé par la compagnie du Midi est achevé en 1866, etc
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=> Le prix aller-retour du 1er train de plaisir pour Bordeaux est de 8 francs en 3ème classe : on est assis sur un banc de bois à l’air libre, 12 francs en 2ème classe et 16 francs pour la 1ère classe (à noter qu’à cette époque un journalier agricole gagne en moyenne 1.7 francs par jour et un artisan entre 2 et 3 francs).
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Le 2 avril 1857, la ligne Bordeaux–Sète (Cette à l'époque) est terminée : Toulouse devient un carrefour ferroviaire entre l’Atlantique et la Méditerranée. Pour fêter cet évènement, un banquet est organisé dans la salle des Illustres du Capitole, réunissant « les hautes autorités civiles, militaires et religieuses, le maire de Pampelune, le directeur des chemins de fer belges et des écrivains de renom tels que Théophile Gautier et Alexandre Dumas fils. Le soir, un feu d’artifice est tiré devant l’école vétérinaire (à l’emplacement de l’actuelle médiathèque José-Cabanis ) ».
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La ligne n’est réellement opérationnelle que vers juin 1857 du fait d’un certain nombre de problèmes techniques.
Un express circulera chaque jour entre Bordeaux et Sète avec un arrêt à Toulouse, 2 omnibus quotidien relieront Bordeaux et Toulouse en 10 heures à peu près et 2 omnibus quotidien égalent entre Sète et Toulouse en 8 heures.
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Des trains sont planifiés également entre Toulouse et Agen et Toulouse et Carcassonne.
L’arrivée du train à Toulouse va profondément modifier la ville : Voir article ICI. Autour de ce qu’on l’on nomme à l’époque le débarcadère du chemin de fer, s’organisent les premiers transports en communs : calèches, omnibus, tramways, autobus (et métro aujourd’hui), vont acheminer les voyageurs de la gare jusqu’au centre-ville.
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Sources
Thierry Bonnafous : 1856 Gare Matabiau, le train arrive enfin !
Jean Suret-Canale : Les chemins de fer de la région toulousaine
https://www.rosinelagier.com/Articles/L15_trains-de-plaisir.pdf
https://trainconsultant.com/2024/03/06/les-trains-du-second-empire-en-france/
https://www.50ans-citedutrain.com/chapitre/1825-1900/
https://histoire-itinerante.fr/cartotheque/evolution-du-reseau-de-chemin-de-fer-francais/
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