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Enfermement (suite) : Hôpital général et dépôt de mendicité

 

Le 27 avril 1656, Louis XIV décrète par lettres patentes la création de l'Hôpital Général de Paris. Cette institution nouvelle se compose de cinq maisons, la Salpétrière, Bicêtre, la Pitié, Scipion et la Savonnerie.

 

H comme Hôpital général et dépôt de mendicité

Cette institution «se donne pour tâche d’empêcher la mendicité et l’oisiveté comme source de tous les désordres».

 

L’article premier de l’arrêt de la Cour du parlement pour l’exécution de l’établissement de l’Hôpital Général annonce que « la Cour […] enjoint à tous les pauvres mendiants valides et invalides, de quelqu’âge qu’ils soient, de l’un et l’autre sexe, de se rendre […] dans la cour de l’hôpital de Notre-Dame de la Pitié […] pour être par les directeurs envoyés et départis aux maisons dépendantes dudit Hôpital Général, auxquelles ils y seront logés, nourris, entretenus, instruits et employés aux ouvrages, manufactures et services dudit hôpital ». Les pauvres mendiants qui ne se seront pas rendus à la Pitié dans les délais prévus y seront amenés de force par les officiers de police. L’article 4 interdit de nouveau la mendicité « à peine du fouet contre les contrevenants, pour la première fois ; pour la seconde, des galères contre les hommes et garçons, et du bannissement contre les femmes et filles ».

 

H comme Hôpital général et dépôt de mendicité

Fronton de l'hôpital général de Douai

 

On l’a vu cette institution précédemment est à la fois une œuvre de charité et une œuvre de stricte police.

 

En tout état de cause l'Hôpital Général est destiné aux pauvres mendiants. Il a une fonction d’assistance et non de soin ; les actes de soin seront réservés à l’hôtel Dieu.

 

l'Hôtel-Dieu est donc tenu de recevoir le malade provenant de l'une des maisons de l'Hôpital Général et de lui administrer les soins et traitements

susceptibles de le rétablir en bonne santé.

 

Les femmes enceintes par exemple sont accueillies dans l'Hôtel-Dieu. Elles y subissent un examen qui détermine si elles se trouvent au terme de leur grossesse.

Dans l'affirmative, elles sont reçues à l'Hôtel-Dieu. Dans le cas contraire, elles sont envoyées à la Maison de Scipion et y attendent le neuvième mois avant d'être acceptées. Après leurs couches elles reviennent à Scipion où leur enfant est mis en crèche et confié éventuellement à une nourrice.

 

Comme on l’a vu précédemment, le fonctionnement de ces lieux se faisait sur la base d’un tri des mendiants : 

Il existe plusieurs « classes » de mendiants. Il y a tout d'abord ceux qui par vice ou fainéantise se livrent sur la voie publique à la quête et sollicitent l'aumône ; ces derniers considérés comme des parias sont tout d'abord exclus de mesures que propose l'Hôpital Général. A l'inverse, ceux que la guerre ou les troubles économiques ont privé de moyens d'existence et qui se trouvent au regard de la société en danger du fait d'une situation qu'ils subissent, ces bons pauvres sont intéressés au premier chef par son établissement. Parmi ceux là, on l’a vu il y a plusieurs type de « bons mendiants », les valides autrement dit les adultes en état de travailler et les autres, enfants ou vieillards mais également les incurables, pourvu que leur mal ne soit pas contagieux

 

H comme Hôpital général et dépôt de mendicité

 

A la veille de la Révolution, on comptait 32 Hôpitaux généraux dans tout le pays.

 

Dans la mesure où il s’agissait d’un lieu de correction et de détention, la nourriture la plus mauvaise et la plus chiche ajoutée à la perte de leur liberté doit faire naître chez eux « le repentir de leur vie passée et la résolution de s’adonner au travail » une fois délivrés.

 

Les détenus seront « instruits, conduits et corrigés dans leurs ouvrages ».

 

Pour récompenser les courageux ceux-ci recevront le 1/6è du produit de leur besogne grâce auquel ils se constitueront un petit pécule.

 

Les dépôts de mendicité vont seconder à partir de 1767 les hôpitaux généraux en détenant eux aussi les mendiants et autres vagabonds.

 

H comme Hôpital général et dépôt de mendicité

Dépôt de mendicité de Villers Cotteret

 

Ils viennent renforcer l’arsenal répressif contre le vagabondage : ils ont en effet un caractère nettement plus répressifs et pénitentiaire que les hôpitaux généraux. En effet s’ils avaient vocation à recueillir les mendiants de la même façon que le faisaient les hôpitaux généraux, 10 ans plus tard ils ne conservent que les plus dangereux , les infirmes et les incapables.

 

En 1773, on compte 58 000 "pensionnaires" dans les dépôts.

 

Mais les mendiants et vagabonds sont toujours bien là malgré tout ce qu'on leur inflige ... L'Empire ne sera pas en reste et décrètera lui aussi la guerre à ces oisifs perpétuels :

Le décret du 5 juillet 1808 « sur l’extirpation de la mendicité » dispose dans son article 1er : « La mendicité sera interdite dans tout le territoire de l’Empire".

L'article 2 nous informe que "les mendiants de chaque département seront arrêtés et conduits dans le dépôt de mendicité dudit département aussitôt que ledit dépôt aura été établi… »

Les articles suivants règlent les formalités et posent les principes d’organisation et d’administration des dépôts.


L’article 274 du Code pénal quant à lui précise que  « Toute personne qui aura été trouvée mendiant dans un lieu pour lequel il existera un établissement public organisé afin d’obvier à la mendicité, sera punie de trois à six mois d’emprisonnement et sera, après l’expiration de sa peine, conduite au dépôt de mendicité. »


L’article 275 précise : « Dans les lieux où il n’existe point encore de tels établissements, les mendiants d’habitude valides seront punis d’un mois à trois mois d’emprisonnement. S’ils sont arrêtés hors du canton de leur résidence, ils seront punis d’un emprisonnement de six mois à deux ans… »

 

Voir aussi l'article suivant sur les dépôts de mendicité

 

Sources

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Le dépôt de mendicité de Toulouse (1811-1818) de David Higgs

L'Hôpital Général de Paris. Institution d'assistance, de police, ou de soins ? de Nicolas Sainte Fare Garnot

Mendier sa vie au XVIIIe siècle : de la résignation à la révolte (Amiens, 1764-1789) de Charles Engrand

Les travaux publics comme ressource : les ateliers de charité dans les dernières décennies du xviiie siècle de Anne Conchon

Les secours aux indigents : un droit ou une faveur de Dominique Godineau,

Quand la pauvreté était un crime de Françoise Froelhy

Le délit de vagabondage au 18ème siècle de Catherine Grand

 

 

 

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