Le pont de Pigasse et l'arche de Tounis
Le pont de Pigasse et l'arche de Tounis
Le Pont de Tounis (qui n'a rien à voir avec l'arche de Tounis), reliant l’ancienne île de Tounis à la ville, enjambe la "Garonnette", ancien bras maintenant asséché de la Garonne, et est le plus ancien pont de Toulouse.
Plan de Toulouse - Rochefort 1670 - on peut voir comment se situe l'île de Tounis
Mais il a existé un autre pont plus ancien encore, traversant la Garonnette plus en aval, à l'endroit où la Garonnette débouchait dans la Garonne sous l’actuel quai de Tounis. Plus précisément il partait de la halle aux poissons (aujourd'hui rue de la Descente de la Halle aux Poissons) et arrivait à la pointe nord de l’ile. Il s'agit du pont qui se trouve au n°12 ci dessous :
Ile de Tounis avec le Pont Neuf tout à droite
Le n°12 correspond au pont de Pigasse ou pont en fil de fer qui est l'emplacement aujourd'hui de l'arche de Tounis (voir plus bas)
Le pont de Tounis est au n°8
La Garonnette figure au n° 7 (aujourd'hui il s'agit de l'avenue de la Garonnette)
La rue des abattoirs au n°11
La rue des Teinturiers au n°6
Jules Chalande (historien né en 1854 à Marseille et mort en 1930 à Toulouse) a retrouvé un texte dans les archives de Toulouse qui atteste de l’existence du pont de Pigasse en 1597.
Il semblerait qu’une crue l’ait détruit en 1608 et qu’il fut reconstruit en bois de chêne en 1612.
Il reprenait le tracé du Pont-Vieux, 1er du nom et fut dénommé Pont de la Halle (la Halle aux poissons était toute proche) ou plus simplement Pont de Bois avant de s'appeler pont de Pigasse pour une raison inconnue.
Hypothèse de restitution cadastrale en 1680
Plusieurs fois réparé, voire entièrement refait (il s’écroule en 1690 et fut reconstruit totalement en 1693 pour 1800 livres), il fut emporté par l’inondation de 1709. Malgré un appel d’offres lancé par les capitouls en 1711 puis en 1720, aucun artisan ne souhaite s’emparer du chantier.
En 1731 l’ingénieur Joseph Abeille (né en 1671 à Vannes et mort en 1756 à Rennes) se lance et reconstruit le pont de bois qui s’effondrera en 1764. (Joseph Abeille a apporté son expertise technique ainsi que des capitaux dans la réparation du moulin du Bazacle et la digue qu’il a construite est toujours celle actuellement utilisée pour produire de l'électricité).
Pont de Bois, dit pont de Pigasse. Plan de construction dressé par l'architecte Souffron, 1612, Ville de Toulouse, Archives municipales, DD213/1 (détail)
Pierre Barthès auteur des Heures perdues, ouvrage rédigé à partir de 1737 écrit à ce sujet :
« Le dimanche 8ème de ce mois (juillet), jour de la dizaine de l’île de Tounis où l’affluence du monde qui passe et qui se rend dans l’île après vêpres pour se divertir est très grande, entre 9h et 10h du soir, le pont qu’on appelle de Pigasse et qui va de la Halle aux poissons dans l’île, tomba dans l’eau, rongé de vétusté. La 3ème partie de l’édifice qui aboutit à Tounis vis-à-vis la maison de Dubarry, s’étant affaissée sur les piliers qui n’étaient plus que de bois pourri, n’ayant jamais été réparée, fut entrainé dans la chute. Personne ne se trouvait à passer dans ce moment funeste, ce qui a été regardé comme un bienfait du ciel, après la grande quantité de monde qui avait passé dessus pendant cette journée. »
il fut définitivement démoli en 1767.
Par la suite un bac sera utilisé pour que les Tounisiens puissent traverser la Garonnette depuis la pointe nord de l’île.
Pierre Barthès précise dans ses Heures perdues que « pour la commodité des bouchers, des habitants, des blanchers, des pêcheurs qui habitent Tounis, ont établi sans doute avec permission, un passage dans une barque pour la traversée où chacun pour le prix d’un liard, peut se faire passer sans pour remonter au pont de la Dalbade, ce qui allongeait beaucoup ».
Ce bac sera utilisé jusque vers 1829 date à laquelle on construisit au même endroit, un pont suspendu (réservé aux piétons) appelé par les toulousains le pont de fil de fer, long de 24m et large de 2m ; il a couté 4 295 frs et 99 cts.
Toutefois entre la décision de construire le pont et l’achèvement de celui-ci, les habitants de Tounis ont décidé d’écrire au maire de Toulouse, Joseph Viguerie, le 6 septembre 1830 :
« les habitants de l’île de Tounis ont l’honneur de vous exposer que depuis longtemps un bac placé sur le canal de fuite (la Garonnette) du moulin du Château leur facilitait le passage de l’île au pont, lorsque la construction du pont en fil de fer est venu interrompre le service de ce bac. Par la démolition de l’escalier de la halle (aux poissons) voilà plusieurs mois qu’ils se trouvent privés de ce passage qui leur est si utile, notamment aux bouchers qui sont obligés, chargés d’un lourd fardeau, de faire un long contour. C’est pourquoi Monsieur le maire, ils viennent solliciter de vos bontés, vu l’escalier provisoire établi à la halle, ordonner au fermier dudit bac de continuer son service, jusqu’à ce que le pont soit totalement achevé, et à défaut autoriser momentanément tout autre individu à faire ce service ».
Mais ce pont ne dura guère car il fut détruit vers 1854 pour faire place à un nouveau quai construit d’après le projet de l’architecte Urbain Vitry, né en 1802 à Toulouse, mort dans cette ville en 1863.
A la place du pont de Pigasse fut construit dans la maçonnerie du quai de Tounis, l’arche de Tounis pour laisser le passage à la Garonnette dont les eaux permettaient encore le fonctionnement du moulin du Château.
1ère photo : l'arche de Tounis et les quais avant 1950 (époque où la Garonnette existait encore) - à noter au loin le clocher de la Dalbade qui s'est effondré en 1926
Seconde photo : l'arche et les quais après 1950 (la Garonnette n'existe plus) et avant 2019, date à laquelle les berges furent rénovées - à noter la buse qui permet l'écoulement de ce qui reste de la Garonnette
Photos tirées du blog : Le Soulier Voyageur http://souliervoyageur.canalblog.com/
L'arche de Tounis et le quai de Tounis après les rénovations de 2018/2019
Photo tirée du blog : Le Soulier Voyageur http://souliervoyageur.canalblog.com/
L'arche de Tounis et sa voûte composée de 9 arcs et au loin le Pont Neuf
La largeur de l’arche est de 12 mètres et est composée de 9 arcs en pierres et en briques
Cette arche est aujourd’hui sèche à l’instar du pont de Tounis puisque la Garonnette a été comblée et asséchée dans les années 1950
1ère photo : la garonnette et le pont de Tounis avant 1950
2nde photo : la Garonnette est le ruisseau au milieu de la photo entre les deux espaces de gazon, le pont de Tounis au second plan
Photos tirées du blog : Le Soulier Voyageur http://souliervoyageur.canalblog.com/
Ce qui reste de la Garonnette aujourd'hui : un ruisseau ; au loin le pont de Tounis
Sources
Les heures perdues sur https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k132172x.image
L'île de Tounis de Jean-Marie Arrouy
Les ponts de Toulouse de Jean Coppolani
L’îlot de la rue de la Descente-de-la-Halle-au-Poisson à Toulouse de Yoan Mattalia