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Enfermement (suite) : Hôpital général et dépôt de mendicité

16 Juin 2018 , Rédigé par srose

 

Le 27 avril 1656, Louis XIV décrète par lettres patentes la création de l'Hôpital Général de Paris. Cette institution nouvelle se compose de cinq maisons, la Salpétrière, Bicêtre, la Pitié, Scipion et la Savonnerie.

 

H comme Hôpital général et dépôt de mendicité

Cette institution «se donne pour tâche d’empêcher la mendicité et l’oisiveté comme source de tous les désordres».

 

L’article premier de l’arrêt de la Cour du parlement pour l’exécution de l’établissement de l’Hôpital Général annonce que « la Cour […] enjoint à tous les pauvres mendiants valides et invalides, de quelqu’âge qu’ils soient, de l’un et l’autre sexe, de se rendre […] dans la cour de l’hôpital de Notre-Dame de la Pitié […] pour être par les directeurs envoyés et départis aux maisons dépendantes dudit Hôpital Général, auxquelles ils y seront logés, nourris, entretenus, instruits et employés aux ouvrages, manufactures et services dudit hôpital ». Les pauvres mendiants qui ne se seront pas rendus à la Pitié dans les délais prévus y seront amenés de force par les officiers de police. L’article 4 interdit de nouveau la mendicité « à peine du fouet contre les contrevenants, pour la première fois ; pour la seconde, des galères contre les hommes et garçons, et du bannissement contre les femmes et filles ».

 

H comme Hôpital général et dépôt de mendicité

Fronton de l'hôpital général de Douai

 

On l’a vu cette institution précédemment est à la fois une œuvre de charité et une œuvre de stricte police.

 

En tout état de cause l'Hôpital Général est destiné aux pauvres mendiants. Il a une fonction d’assistance et non de soin ; les actes de soin seront réservés à l’hôtel Dieu.

 

l'Hôtel-Dieu est donc tenu de recevoir le malade provenant de l'une des maisons de l'Hôpital Général et de lui administrer les soins et traitements

susceptibles de le rétablir en bonne santé.

 

Les femmes enceintes par exemple sont accueillies dans l'Hôtel-Dieu. Elles y subissent un examen qui détermine si elles se trouvent au terme de leur grossesse.

Dans l'affirmative, elles sont reçues à l'Hôtel-Dieu. Dans le cas contraire, elles sont envoyées à la Maison de Scipion et y attendent le neuvième mois avant d'être acceptées. Après leurs couches elles reviennent à Scipion où leur enfant est mis en crèche et confié éventuellement à une nourrice.

 

Comme on l’a vu précédemment, le fonctionnement de ces lieux se faisait sur la base d’un tri des mendiants : 

Il existe plusieurs « classes » de mendiants. Il y a tout d'abord ceux qui par vice ou fainéantise se livrent sur la voie publique à la quête et sollicitent l'aumône ; ces derniers considérés comme des parias sont tout d'abord exclus de mesures que propose l'Hôpital Général. A l'inverse, ceux que la guerre ou les troubles économiques ont privé de moyens d'existence et qui se trouvent au regard de la société en danger du fait d'une situation qu'ils subissent, ces bons pauvres sont intéressés au premier chef par son établissement. Parmi ceux là, on l’a vu il y a plusieurs type de « bons mendiants », les valides autrement dit les adultes en état de travailler et les autres, enfants ou vieillards mais également les incurables, pourvu que leur mal ne soit pas contagieux

 

H comme Hôpital général et dépôt de mendicité

 

A la veille de la Révolution, on comptait 32 Hôpitaux généraux dans tout le pays.

 

Dans la mesure où il s’agissait d’un lieu de correction et de détention, la nourriture la plus mauvaise et la plus chiche ajoutée à la perte de leur liberté doit faire naître chez eux « le repentir de leur vie passée et la résolution de s’adonner au travail » une fois délivrés.

 

Les détenus seront « instruits, conduits et corrigés dans leurs ouvrages ».

 

Pour récompenser les courageux ceux-ci recevront le 1/6è du produit de leur besogne grâce auquel ils se constitueront un petit pécule.

 

Les dépôts de mendicité vont seconder à partir de 1767 les hôpitaux généraux en détenant eux aussi les mendiants et autres vagabonds.

 

H comme Hôpital général et dépôt de mendicité

Dépôt de mendicité de Villers Cotteret

 

Ils viennent renforcer l’arsenal répressif contre le vagabondage : ils ont en effet un caractère nettement plus répressifs et pénitentiaire que les hôpitaux généraux. En effet s’ils avaient vocation à recueillir les mendiants de la même façon que le faisaient les hôpitaux généraux, 10 ans plus tard ils ne conservent que les plus dangereux , les infirmes et les incapables.

 

En 1773, on compte 58 000 "pensionnaires" dans les dépôts.

 

Mais les mendiants et vagabonds sont toujours bien là malgré tout ce qu'on leur inflige ... L'Empire ne sera pas en reste et décrètera lui aussi la guerre à ces oisifs perpétuels :

Le décret du 5 juillet 1808 « sur l’extirpation de la mendicité » dispose dans son article 1er : « La mendicité sera interdite dans tout le territoire de l’Empire".

L'article 2 nous informe que "les mendiants de chaque département seront arrêtés et conduits dans le dépôt de mendicité dudit département aussitôt que ledit dépôt aura été établi… »

Les articles suivants règlent les formalités et posent les principes d’organisation et d’administration des dépôts.


L’article 274 du Code pénal quant à lui précise que  « Toute personne qui aura été trouvée mendiant dans un lieu pour lequel il existera un établissement public organisé afin d’obvier à la mendicité, sera punie de trois à six mois d’emprisonnement et sera, après l’expiration de sa peine, conduite au dépôt de mendicité. »


L’article 275 précise : « Dans les lieux où il n’existe point encore de tels établissements, les mendiants d’habitude valides seront punis d’un mois à trois mois d’emprisonnement. S’ils sont arrêtés hors du canton de leur résidence, ils seront punis d’un emprisonnement de six mois à deux ans… »

 

Voir aussi l'article suivant sur les dépôts de mendicité

 

Sources

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Le dépôt de mendicité de Toulouse (1811-1818) de David Higgs

L'Hôpital Général de Paris. Institution d'assistance, de police, ou de soins ? de Nicolas Sainte Fare Garnot

Mendier sa vie au XVIIIe siècle : de la résignation à la révolte (Amiens, 1764-1789) de Charles Engrand

Les travaux publics comme ressource : les ateliers de charité dans les dernières décennies du xviiie siècle de Anne Conchon

Les secours aux indigents : un droit ou une faveur de Dominique Godineau,

Quand la pauvreté était un crime de Françoise Froelhy

Le délit de vagabondage au 18ème siècle de Catherine Grand

 

 

 

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Qui sont ces gueux, mendiants et autres vagabonds que l'on enferme?

16 Juin 2018 , Rédigé par srose

 

Le mendiant est celui « qui mendie », le vagabond est celui qui « erre çà et là », qui est « sans aveu, sans état, sans domicile » : Grand Larousse universel du XIXe siècle.

G comme qui sonr ces Gueux?

Sans asile - Fernand Pelez

 

Qu’en disent les autorités ? En 1534, le vagabond répond à la définition suivante : « tous vagabonds, oisifs, gens sans aveu et autres qui n’ont aucun bien pour les entretenir et qui ne travaillent ny labourent pour gagner leur vie » sera coupable du délit de vagabondage.

 

2 critères définissent donc le vagabond :

- le manque de travail, et donc de ressources pour vivre,

- et l’absence d’appartenance à une communauté.

 

En 1666 on ajoute l’absence de caution morale d’un tiers digne de foi :: « seront déclarez gens vagabonds et gens sans aveu, ceux qui n’auront aucune proffession ny mestier, ny aucuns biens pour subsister, qui ne pourront faire certifier de leurs bonnes vies et mœurs par personne de probité connues et dignes de foy et qui soient de condition honneste ».

 

En 1701, « Déclarons vagabonds et gens sans aveu ceux qui n’ont ny profession, ny mestier, ny domicile certain, ny bien pour subsister, et qui ne sont avouéz, et ne peuvent certifier de leurs bonnes vies et mœurs, par personnes dignes de foy ».

On ajoute l’absence de domicile.

 

En 1720, on ne distingue plus le mendiant du vagabond : les critères définissant le vagabondage s’étendent à la mendicité : le mendiant domicilié entre dans la définition générique du délit de vagabondage.

Une loi du 1er février - 28 mars 1792 considère comme vagabond toute personne trouvée hors de son canton et incapable de justifier dans les vingt jours de son inscription sur le tableau de sa commune de domicile.

 

En fait soyons pragmatique : « les mendiants et les vagabonds appartiennent à ce monde de la grande pauvreté, incapables d’assurer leur minimum vital, et donc placés dans une situation de dépendance et d’exclusion ».

 

G comme qui sonr ces Gueux?

Dans les faits, nous retrouvons de petits paysans vivotant d’une maigre agriculture de subsistance, des marchands ruinés, des soldats et matelots démobilisés, de bohémiens, des pélerins, des prostituées …

Pourquoi les pélerins ? il s’agit des en fait des faux pélerins profitent de la bienveillance des personnes qu’ils croisent ; mais en pratique la maréchaussée ne fait pas de réelle distinction entre les vrais et les faux pélerins :

Jaquette Tisné 44 ans a « des yeux gris bien fendus, nez bien fait, montée en couleur » ; capturée, le procès verbal note qu’ « elle mendie depuis longtemps ayant été deux fois à St Jacques de Compostelle et une fois à Rome, un peu imbécile, elle a une grande liberté dans ses propos » mais « n’est point libertine ».

G comme qui sonr ces Gueux?

 

Les bohémiens, les égyptiens sont considérés comme des fauteurs de troubles et leurs femmes séduisent pat la divination des innocents allant même jusqu’à se faire épouser !

 

Finalement, potentiellement, toute personne hors de chez elle peut être attrapée par les chasse coquin ; des procès verbaux notent que tel mendiant a été pris par exemple à plus d’une demi lieue de chez lui (2km)….

Les colporteurs représentent un métier à risques (tout comme les journaliers et toute autre personne cherchant un emploi) … ainsi Jean Poulon d’Albi capturé le 24 septembre 1774 possédait 3 livres 6 sols une boite en bois « dans laquelle il s’est trouvé des jarretières, 6 miroirs, 50 autres miroirs, 30 tabatières à la bergamote, 12 tabatière de carton, 6 rasoirs, 12 étuis, 9 couteaux, 6 autres couteaux à manche d’argent, 3 flacons ».

Antoine Roche natif de Lyon « a été arrêté nanty d’un livre de hazard avec des chiffres romains, un cornet de corne, un état portant explication d’une petite loterie, plus des tas de boîtes, tabatières, bijoux, flacons, petits couteaux, des couverts d’argent, une paire de courroies, une estampe de Noble Jeu de Hazard »

Bernard Carrère un autre colporteur de 33 ans, manœuvre de profession est capturé : « nanty de deux chemises, une paire de bas de laine, deux paires de mauvais souliers, une cuillère d’étain, deux livres intitulés le parfait maréchal et l’imitation de Jésus Christ, 6 petits alphabets, trois paquets entiers de lie, un paquet de jarretière, 12 boutons de corne à bretelle ».

 

G comme qui sonr ces Gueux?

 

Le registre de l’hôpital général de Pau indique la profession des vagabonds capturés : des laboureurs, des tisserands, des tailleurs d’habits, des charrons …

 

Est-ce à dire qu’ils étaient sur les chemins pour les besoins de leur métier et n’ont pas pu prouver la réalité des faits ou bien alors, sans emploi, mendiaient-ils bel et bien ?

 

L’accident et la maladie font aussi tomber dans la mendicité : Pierre Ferran explique « qu’il y a 12 ans qu’il se donna un coup de hache sur la rotule du genou droit et qu’il se la fendit en deux et fut obligé de rester alité pendant 6 mois et a dépensé le comptant de presque tout le peu qu’il possédait sans pouvoir se procurer aucune guérison, étant obligé de marcher même avec beaucoup de peine sur deux béquilles et d’ailleurs affligé depuis de longues années d’une double hernie, ce qui l’a mis dans un état le plus triste et le plus misérable, incapable de pouvoir agir d’aucune façon pour gagner sa vie qu’en demandant la charité pour se procurer la subsistance ». 

G comme qui sonr ces Gueux?

Pierre Douabé est un mendiant à Rennes au 18ème siècle. C'est un ancien soldat de 50 ans qui travaillait comme terrassier, qu'une « espèce de lèpre aux jambes » a contraint à séjourner régulièrement à l'hôtel-Dieu de Rennes. À sa sortie, il commence à demander l'aumône car il a perdu son travail.

 

G comme qui sonr ces Gueux?

Giacomo Ceruti - les 3 mendiants

 

Enfin il y a les bandes affamées qui parcourent les chemins, et se pressent aux portes des villes : Les malheurs des temps dispersent les familles, chassent les paysans de leur terre, les artisans de leur ville et ils reconstituent ensemble une communauté qui leur est propre, devenant en quelque sorte des mendiants « professionnels ».

Ainsi, en 1816 nous avons une année de très mauvaise récolte : le 31 octobre trois voitures chargées de grains sont pillées à Châteauneuf, par « une populace d’hommes et de femmes, dont l’opiniâtreté et les vociférations » viennent rapidement à bout des forces de l’ordre, présentes en nombre insuffisant. Les coupables sont  poursuivis et les propriétaires des voitures pillées devront être indemnisés.

Le rapport montre que les 155 coupables, «ouvriers, maçons, tisserands et un petit nombre de couteliers», sont tous pauvres, sans moyens d’existence et dans l’impossibilité de rembourser les propriétaires des grains...

 

Les femmes de mauvaise vie

Marie de Lauseret , 18 ans, originaire de Laruns et réfugiée à Pau (à 40 km de son village) ; elle y apprend le métier de tireuse d’eau et loge dans un coin de chambre qu’elle loue mais elle est chassée parce que sa loueuse l’accuse de frayer avec une autre fille, dépravée, qui se laissait « cajoler par les garçons » ; sans toit, elle erre dans les rues et se cache dans les coins. Et « entretient des colloques suspects avec les jeunes hommes ». Elle est capturée et amenée au dépôt d’Auch.

Un arrêt du parlement de Bretagne du 29 mars 1759 observe qu'à Rennes la prostitution est devenue un fléau : « Toutes les nuits, des bandes de ces malheureuses occupent dans les carrefours et dans les différentes rues de la ville des postes assignés où elles attirent et assemblent les passants de tous âges ; le scandale est si général que d'honnêtes personnes n'osent presque sortir de leur maison. On entend journellement des cris de force, des hurlements, des batteries et des querelles. »

Les femmes qui se prostituent sont le plus souvent des mères célibataires, des veuves ou des filles séduites, âgées de 20 à 25 ans, qui exercent des petits métiers (fileuses le plus souvent, servantes, journalières, blanchisseuses).

 

Comment les autorités tentent de remédier à cette engeance ?

Outre la déportation dans les colonies, l’Hôpital général va devenir le principal mode de mise à l’écart des prostituées jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Les dépôts de mendicité ne seront pas en reste.

Les filles de mauvaise vie se retrouvent dans les dépôts « au nom de la morale, de l’ordre et de l’honnêteté publique »

A Paris, « les femmes d’une débauche et prostitution publique et scandaleuse, ou qui en prostituent d’autres, seront renfermées dans un lieu particulier destiné pour cet effet dans la maison de la Salpêtrière ». Les débauchées pourront y être enfermées sur décision de justice. Un inspecteur est chargé de la police des mœurs. Il est chargé, jour et nuit, de les arrêter et de les conduire au dépôt Saint-Martin, passage obligé des futures condamnées. Le lendemain, les femmes arrêtées comparaissent à l’audience du grand Châtelet. Les femmes condamnées, escortées par des archers, sont alors emmenées en charrette, dont les planches sont recouvertes de paille, à travers les rues de Paris, à la vue de tous, jusqu’à la Salpêtrière.

 

F comme Femmes de mauvaise vie

 

Un petit mot sur le dépôt de Saint Denis ou maison de détention de Franciade au début du 19ème siècle. On y envoya jusqu’en 1816 « ces filles dégoûtantes, autant ruinées sous le rapport physique que sous le rapport moral et qui sans ressources et mourant de faim, se font arrêter partout et peuvent être considérées comme des mendiantes et de véritables vagabondes. A une époque où l’on avait l’habitude de les faire reconduire dans leurs pays, on envoyait à Saint Denis celles qui par leur âge et leurs infirmités étaient hors d’état de faire la route »

« Depuis 10 ou 12 ans, le nombre de prostituées envoyées à Saint Denis par ordre de l’administration s’élève tout au plus à 8 ou 10 dans le courant de l’année … le plus souvent ces envois se font à la demande des médecins pour des cas incurables tels que cancer, désorganisation, fistule recto-vaginales, idiotisme etc quelquefois aussi comme moyen de répression par exemple lorsqu’une de ces filles ne veut pas subir une opération reconnue indispensable ».

F comme Femmes de mauvaise vie

 

Sources

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Le dépôt de mendicité de Toulouse (1811-1818) de David Higgs

L'Hôpital Général de Paris. Institution d'assistance, de police, ou de soins ? de Nicolas Sainte Fare Garnot

Mendier sa vie au XVIIIe siècle : de la résignation à la révolte (Amiens, 1764-1789) de Charles Engrand

Les travaux publics comme ressource : les ateliers de charité dans les dernières décennies du xviiie siècle de Anne Conchon

Les secours aux indigents : un droit ou une faveur de Dominique Godineau,

Quand la pauvreté était un crime de Françoise Froelhy

Le délit de vagabondage au 18ème siècle de Catherine Grand

 

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Enfermement des pauvres

15 Juin 2018 , Rédigé par srose

 

E comme Enfermement

L’idée est de séparer les réprouvés de toute sorte du corps social.

Un « test » a été fait en 1581 dans la Rome des deux papes : Grégoire XIII et Sixte Quint. 850 mendiants furent enfermés dans un monastère désaffecté …. et relâchés un peu plus tard faute d’argent.

L’idée fait son chemin malgré tout et à Paris au 17ème siècle le Grand Bureau des Pauvres confine dans l’Hospice Saint Germain pour les y dissimiler « les vieils et decrepitz et autres pauvres incorrigibles ou invalides ou impotens ».

Louis XIV va déclarer très vite la guerre à ces oisifs incapables de s’amender, à ces « vraÿs fénéans » : l’idée qui circule alors est de créer des espaces de coercition où l’on va leur enseigner des rudiments de religion et les faire travailler : en les soumettant à la pénitence et au travail, on les aiderait ainsi à dominer leurs mauvais penchants.

Et c’est comme cela qu’apparurent les hôpitaux généraux et un peu plus tard les dépôts de mendicité et autres « ateliers de charité ».

En 1693 Tarbes se dote de l’hôpital de la Clôture qui est destiné à recevoir les mendiants bien portants que les chasse-gueux vont débusquer. Ces pauvres hères, habillés de blanc avec une croix rouge sur la poitrine voient leur vie leur échapper totalement puisqu’un règlement va gérer chaque parcelle de leur vie :

Levés en été à 4h et en hiver à 5h, couchés à 21h, à 6h Rosaire, à 10h seconde partie du Rosaire, après le diner, une courte prière pour les bienfaiteurs, à 4h 3ème partie du Rosaire, à 7h litanie des Saints, puis prière du soir, les repas sont à 8h (déjeuner), 11h (dîner), et 18h (souper), et entre chaque prière et repas, ce sera du travail et des chants sacrés. Les récréations prévues uniquement le dimanche et les jours de fêtes pour instruire « les enfermez » des mystères de la religion.

Ceux qui se rebiffent seront mis au cachot ou privé de repas …

Ce nouveau dispositif est vu comme une réelle avancée pour les pauvres qui vont ainsi ne plus succomber à la « paresse dédaigneuse et insolente ». C’est pourquoi par exemple le maréchal de Navailles et sa fille la duchesse d’Elbeuf donnent des sommes importantes à l’hôpital de la Cloture.

E comme Enfermement

 

Une des premières bienfaitrices  de cet hôpital au XVIIème siècle s'appelait Isabeau de Rimbles d'Orignac. Elle légua à hôpital de Tarbes une rente de 500 livres. Puis une somme de 300 livres fut léguée par un administrateur nommé Bonsom Pedoux.

A noter que louis XIV a étendu en 1693 le système de l’hôpital général à tous les bourgs et villes du royaume.

Mais malgré ce système il y a toujours des mendiants ! Les autorités de l’époque sont consternées tant elles pensaient tenir La Solution pour éradiquer ces hordes de vagabonds, mendiants, oisifs …

Une ordonnance du 30 juillet 1777 renforce encore l’arsenal judiciaire :  tous les mendiants de l’un et l’autre sexe,  qu’ils aient un domicile fixe ou non, devront dans un délai de 15 jours prendre état, emploi, métier ou profession dont ils puissent vivre vraiment ; passé ce délai toute personne prise en train de demander la charité « dans les campagnes ou sur les grandes routes », dans les rues des bourgs, dans les églises et autres lieux publics quel que soit son âge, sera arrêtée et conduite en prison pour y être punie.

En vain …

 

Voir cette page sur l'histoire des hôpitaux de Tarbes

 

Sources

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Le dépôt de mendicité de Toulouse (1811-1818) de David Higgs

L'Hôpital Général de Paris. Institution d'assistance, de police, ou de soins ? de Nicolas Sainte Fare Garnot

Mendier sa vie au XVIIIe siècle : de la résignation à la révolte (Amiens, 1764-1789) de Charles Engrand

Les travaux publics comme ressource : les ateliers de charité dans les dernières décennies du xviiie siècle de Anne Conchon

Les secours aux indigents : un droit ou une faveur de Dominique Godineau,

Quand la pauvreté était un crime de Françoise Froelhy

Le délit de vagabondage au 18ème siècle de Catherine Grand

 

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Bonté charitable contre crime de pauvreté

15 Juin 2018 , Rédigé par srose

 

Le message chrétien incite à l’amour de son prochain et donc à la charité.

"J'ai eu faim et vous m'avez donné à manger, j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire, j'étais étranger et vous m'avez recueilli, j'étais nu et vous m'avez vêtu, j'étais malade et vous m'avez visité, j'étais en prison et vous êtes venu vers moi » Matthieu

  

B comme Bonté charitable et bureau de charité

L’évêque Sébastien Zamet au 17ème siècle affirmait qu’aider les humbles, c'était à la fois, rendre grâces à  Dieu et assurer son salut. Ce n’est donc pas une charité tournée réellement vers l’autre, donnée par pur altruisme mais une charité plutôt égoïste.

Ainsi Jean louis Roch, auteur du livre « Le jeu de l'aumône au Moyen Age» précise bien que «Le pauvre reste un oublié, il n'est pas considéré pour lui-même, mais comme l'image du Christ, comme l'instrument du salut du riche, comme un objet ».

Quoi qu’il en soit, pour satisfaire à cette vertu, de nombreuses villes au moyen âge ont mis en place « l’Aumône générale », une sorte de bureau des pauvres qui va se charger de recenser et d’enregistrer les indigents puis qui va les trier en deux catégories : les invalides aidés par des distributions régulières de pain et les valides affectés systématiquement à des travaux publics.

Ne nous y trompons pas, dès le départ, les bureaux des pauvres excluaient des secours « les vagabonds, fainéants et gens sans aveu». Comment les distinguait elle des autres ? ce sera surtout une affaire de circonstances, nous le verrons au fur et à mesure des articles.

Des chasse pauvres ou chasse coquins ou encore chasse gueux étaient chargés d’expulser de la cité les errants de tous horizons et de traquer toux ceux qui faisaient l’aumône. En effet le bureau des pauvres était censé suppléer à l’aumône en prélevant une taxe des pauvres auprès des habitants de la cité , donc mendier était désormais interdit.

Certains prêtres s’insurgèrent contre ce tri car finalement laisser un pauvre à la porte, c'était repousser le Christ, c'était courir à la damnation.

 

Les pauvres étant pour certains les Elus de Dieu, des legs parfois très importants sont faits en leur faveur.

Ainsi le 13 septembre 1767 le sieur Arnaud Soussens, Bagnerais, laisse t-il « aux Pauvres Honteux de Bagnères une maison, un jardin, des écuries pour faire du Bouillon aux pauvres à perpétuité »

Un archiprêtre de la paroisse de Monfaucon crée en 1700 une fondation dont les revenus devaient permettre de verser « une somme de trente livres pour chaque fille pauvre et vertueuse pour l’aider à se marier et la même somme pour donner un métier à de pauvres garçons ».

Maitre Dumoret avocat au parlement rédigea en 1765 son testament dans lequel il exige que son héritier distribue 50 livres aux « Pauvres présents lors de ses honneurs funèbres » qu’il désire d’ailleurs modestes.

 

Crime de pauvreté

Toutefois, il faut reconnaître que le message chrétien d’amour charitable n’est quand même pas passé par toutes les oreilles.

C comme Crime de pauvreté contre Charité

Ainsi le 11 mai 1732 à Mauvezin dans le Gers, un certain Jean « pauvre mendiant estranger » attendait sur le parvis de l’église quelque aumône quand il fut pris à parti soudainement et brutalement par un certain Jean Monnin. Celui-ci lui a prononcé de « sales paroles » avant de se ruer sur le malheureux à coups de bâton. Il a fallu ‘intervention de plusieurs personnes pour arriver à dégager le pauvre mendiant.

Ce Jean Monnin est lui aussi un misérable déclassé (valet de boucher devenu brassier sans emploi et qui vit de menus larcins).

Il fut jeté au cachot et durement puni non pas seulement parce qu’il avait agressé le mendiant mais parce qu’il s’en était pris aux honnêtes gens qui avaient essayé de le calmer et par ce que tout simplement il est pauvre et a troublé l’ordre public.

Les juges lui demandent de faire amende honorable devant tous « en chemise, le hard au col, pieds nus, tenant en ses mains une torche de cire ardente et du poids de deux livres » contraint de s’agenouiller devant les portes de l’église puis devant celles de l’hôtel de ville, « demandant pardon à Dieu, au Roy, et à la justice des crimes de rébellion par luy commis ».

Il sera ensuite livré « entre les mains d’un patron de galère », il y servira le roi comme forçat pendant 6 années.

Et enfin il devra payer une amende de 20 livres et les dépens de justice (73 livres, 15 sols et 8 deniers).

La dureté de cette sanction tient au fait que les villes sont envahies de pauvres et que ces misérables font peur : la misère n’est plus vertueuse mais redoutable, obscène, abjecte.

Les temps difficiles liées aux guerres, famines, et autres catastrophes jettent à la rue quantité d’hommes, de femmes et d’enfants qui livrés à eux même, en quête de quoi survivre deviennent bien malgré eux potentiellement dangereux.

Pour protéger les honnêtes gens, des mesures plus radicales vont être prises : l’enfermement. 

 

Dans cet article j'explique ce qui était mis en place pour aider les pauvres avant la Révolution.

 

Au 19ème siècle la vision du pauvre n'a guère changé  ... 

 

« D’où qu’ils viennent, les mendiants et les vagabonds, que l’on peut bien confondre dans ce même point de vue, sont un danger pour la société, car l’absence de ressources, l’incertitude des moyens d’existence, sont pour eux un stimulant perpétuel au maraudage, au vol et à de pires délits. Ce sont des parasites qui coûtent à la collectivité plus qu’on se l’imagine et qui, à ne consulter que l’intérêt, sont toujours trop nombreux ». Paroles du substitut du procureur général près la Cour d’appel d’Orléans, Monsieur Drioux, en 1892

 

A comme Avant toute chose

Alfred Stevens
Ce que l'on appelle le vagabondage
1854

Sources

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Les dépôts de mendicité sous l’Ancien Régime et les débuts de l’assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) de Christine Peny

Le dépôt de mendicité de Toulouse (1811-1818) de David Higgs

L'Hôpital Général de Paris. Institution d'assistance, de police, ou de soins ? de Nicolas Sainte Fare Garnot

Mendier sa vie au XVIIIe siècle : de la résignation à la révolte (Amiens, 1764-1789) de Charles Engrand

Les travaux publics comme ressource : les ateliers de charité dans les dernières décennies du xviiie siècle de Anne Conchon

Les secours aux indigents : un droit ou une faveur de Dominique Godineau,

Quand la pauvreté était un crime de Françoise Froelhy

Le délit de vagabondage au 18ème siècle de Catherine Grand

 

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W comme WAR

2 Juillet 2017 , Rédigé par srose

W comme WAR

 

Frouzins compte 20 Frouzinois morts lors de la première guerre mondiale

Je vous invite à aller sur cette page pour en savoir plus sur chacun d’eux 

Je suis en train de faire des recherches sur chacun d’eux et j’espère terminer en fin d’année pour pouvoir éditer un petit livret pour les petits Frouzinois des écoles de mon village …

 

 

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Z comme ZUT j'ai oublé de citer mes sources !

2 Juillet 2017 , Rédigé par srose

 

J’ai réuni plusieurs sources pour rédiger mes articles

 

Voici les principales :

 

Revue de Comminges, Société des études du Comminges, Julien Sacaze, 1903

http://www.frouzins.info/

Une communauté rurale à la veille de la Révolution : Frouzins, d’après le cadastre de 1784, Jean Coppolani

Les Huguenots en Comminges, documents inédits 1900

Dictionnaire des familles françaises anciennes ou notables à la fin du XIXe siècle / par C. d'E.-A. [Chaix d'Est-Ange]

Société des études du Comminges, Revue de Comminges,  1983/01-1983/03.

Mémoires de l'Académie des sciences, inscriptions et belles lettres de Toulouse (1901)

Revue des Pyrénées et de la France méridionale : organe de l'Association pyrénéenne et de l'Union des sociétés savantes du Midi. 1889-1914.

Société de géographie (Toulouse). Bulletin de la Société de géographie de Toulouse. 1989-1990.

Généalogie et histoire de la Caraïbe, Entre Guadeloupe et Toulouse, Bernadette et Philippe Rossignol

Mousnier Mireille, Viader Roland, Ferrand Guilhem. Le rempart de la coutume. In: Archéologie du Midi médiéval. Tome 25, 2007. pp. 123-133

Société des études du Comminges, Revue de Comminges. 1902.

 

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V comme VIGNES, terres labourables, …

25 Juin 2017 , Rédigé par srose

La matrice cadastrale de 1784 de Frouzins distingue six modes d'utilisation du sol : Terres (labourables), Vignes, Prés, Bois, Jardins et Patus (ou cours), ces deux derniers souvent cadastrés avec la maison qu'ils accompagnent. 

V comme VIGNES, terres labourables, …

Clergé, noblesse et bourgeoisie détiennent plus des quatre cinquièmes des terres labourables, ainsi que la totalité des prés et des bois. Mais les paysans ont un peu plus de la moitié des vignes. 

V comme VIGNES, terres labourables, …

 arpents, pugnérées, boisseaux : voir ici

Frouzins dispose d’un canal d’irrigation mais a peu de prairies. En 1895, sont cultivés le froment, la vigne, le sainfoin, des légumes, des pommes de terre et de l’avoine.

 

En 1884 la récolte moyenne est de 2 695 hectolitres de froment, 12 360 hectolitres de vin, 300 hectolitres de légumes, 300 hectolitres de pommes de terre, 500 hectolitres d’avoine, 3500 quintaux métriques de sainfoin.

  

Les Frouzinois sont ainsi essentiellement  producteurs de céréales.

Les grands et moyens propriétaires confient en général le travail à un ou plusieurs métayers ou maîtres-valets. Pour les périodes de travail intense, ils font appel au renfort de travailleurs temporaires, des brassiers, estivandiers ou solatiers.

Cette main-d'oeuvre permanente ou temporaire est fournie par les petits paysans, à qui leur lopin de terre n'assure pas la subsistance. Ils sont payés en nature et principalement en grains qui leur permet de confectionner leur pain et la nourriture de quelques animaux de basse-cour, volaille et cochon.

 

La vigne en 1895 occupe les 5/7ème de la surface; le vin produit est peu alcoolique.

Mais le phylloxera est apparu en 1883 et s’étend déjà 10 plus tard à 4 ha de vignes.

La disparition des vignes sera difficile à vivre car la vigne, pour les habitants sans grandes ressources, représente une source de revenu monétaire qui permet de payer ce que le paysan ne produit pas : habillement, mobilier parfois, et aussi l'impôt.

 

En 1895 on utilise aux travaux des champs : le bœuf, le cheval, le mulet et la jument.

On compte 190 animaux domestiques cette année là dont 60 bœufs, un cheval entier, 42 chevaux hongres, 37 juments, 22 mulets et 8 mules.

 

 

 

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Y comme moYens de communication

25 Juin 2017 , Rédigé par srose

En 1895 Frouzins n’a ni télégraphe ni bureau de poste. Un facteur rural venant de Muret dessert le village en apportant chaque jour entre 9h et 10h du matin le courrier.

S’agissant des voies de communication, elles sont dans un parfait état d’entretien à cette époque. « Le chemin d’intérêt commun n°23 de Toulouse à Aurignac est à 400 mètres au levant du village ». Une diligence s’y trouve, toujours à disposition des voyageurs ayant besoin d’aller à Toulouse ou à Muret.

Il semble que cette voiture soit régulièrement de passage chaque matin à 8 heures pour toulouse et chaque soir à 5 heures pour Muret et le Lherm.

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X comme eXcès des gens de guerre

25 Juin 2017 , Rédigé par srose

 

La date n’est pas connue mais les faits semblent dater de la fin du 16ème siècle. Suite à une épidémie de peste qui s’est abattue sur Frouzins, les habitats du village se sont endettés pour soigner les malades.

Mais ne pouvant payer ils furent assignés par leurs créanciers et ils furent condamnés à payer.

Or dans une supplique adressée « aux gens des Trois Etats », les Frouzinois déclarent être ruinés du fait des impositions du marquis de Villars, gouverneur de Guyenne nécessaire à l’entretien de son armée. Les habitants ont dû fournir du blé, de l’avoine, du vin, des moutons et des charrettes. A cela s’ajoute la perte d’un cheval qui fut tué plus les frais d’un gendarme blessé lors d’une visite de nuit avec pertes de chevaux et de charrettes, frais d’un charretier blessé par arquebuse, et entretien de 300 chevaux. L’armée resta 8 jours sur place et la présence des soldats s’accompagna de pillage sur Frouzins et aux alentours. Ils demandent donc à être remboursés pour les préjudices subis et demandent également semble t-il à ne pas payer du moins de suite ce à quoi ils ont été condamnés.

« A cauze de quoy, Mrs, les pauvres suppliants vous supplient très humblement avoir pitié et compassion d'eux et de leur misérable vie, et ce faysant plerra à vos bénignes grâces ordonner, attendu les faicts susdits, qu'ils sont ruynés de tout en tout, et que presque ils n'ont moyen de se substanter le coeur d'un morceau de pain, à cause que par le moyen des pilliages et batementz ils sont destitues de tous moyens, qu'ils seront rembources de tous lesdist frais, lesquels on pourra mettre sur tout le pays, et ils en bailleront au vray le rolle et aquits et quictes, ou tout le moins partie d'iceulx, ou bien, en tout évènement, qu'ils n'en paieront aulcuns quels que soient jusques à ce que les fruits, qu'il plaise à Dieu garder, soient recullis, afïn de subvenir aux affaires du pays, le proffit duquel ils désirent aultant que pour eulx mesmes, et s'assurants de vostre bonne justice, prieront Dieu qu'il vous doinct ce que désirés, d'un si bon coeur, qu'ils demeurent à jamais voz fideles serviteurs »

 

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U comme US et coutumes

25 Juin 2017 , Rédigé par srose

 

Fragment de la coutume de Frouzins - ci dessous le "rituel" à suivre par le seigneur de Frouzins pour prendre pleinement possession de sa seigneurie.

 

Antoine Inardi, seigneur de Frouzins , prend sa charge en 1472.

Pour prendre possession de la seigneurie, il devait obtenir le serment de fidélité des consuls et des habitants. Mais ce serment n’intervenait qu’après la lecture de l’ancienne coutume et la notification au seigneur des privilèges des « manants ». S’il promet d’être bon seigneur et de respecter ces privilèges les habitants lui juraient alors fidélité.

 

« S'ensuivent les Usages et Coutumes observés de toute antiquité dans le lieu de Frouzins par les Seigneur. Consuls et Habitants d'icelui.

 

Premièrement il est usité et accoutumé dans ledit lieu de Frouzins qu'à l'avènement de chaque nouveau Seigneur et avant que l'on soit tenu de le prendre et reconnaître pour tel, il doit jurer aux Consuls et habitants qui sont et seront, de tenir, observer et garder les Coutumes, Usages et Privilèges observés de tout temps dans ledit lieu.

 

Item que ledit Seigneur donnera aide et secours aux habitants en leurs affaires, comme en ses affaires personnelles, de tout son pouvoir, et qu'il leur sera bon et fidèle.

 

Item il est usité et accoutumé que les habitants de Frouzins doivent payer une moitié des oublies le jour de Notre-Dame d'Août, et l'autre moitié le jour de Notre-Dame de Septembre qui suit. Ils ne les paient pas le jour qu'ils doivent payer les droits pour la justice ainsi qu’il est marqué dans les Livres, anciens Documents et Livres de paiements, et le Seigneur doit venir lever les oublies audit lieu, les jours ci-dessus fixés.

 

Item il est usité et accoutumé que les tenanciers et habitants dudit lieu sont obligés de payer comme il a été dit les oublies mais seulement en la forme et manière exprimée dans les Documents et Anciens Livres.

 

Item il est usité et accoutume que le Seigneur ne doit pas mettre de garde dans la forêt du bétail, ni aux pâturages, ni les paysans non plus.

 

Item il est usité et accoutumé dans ledit lieu que les Consuls dudit lieu, par une habitude ancienne et non interrompue, exercent la juridiction haute, moyenne et basse, et sont juges dans les causes civiles et criminelles : cet exercice leur appartient comme étant juges à la place du Seigneur, et l'institution des Assesseurs et du Notaire ordinaire dudit lieu ainsi que leur destitution quand elle leur parait opportune appartiennent purement et simplement aux Consuls.

 

Item il est usité et accoutumé que les plaintes en justice appartiennent au Seigneur ainsi que les condamnations, et la plainte monte à cinq blancs, et nul ne peut la faire à moins que la dette n'excède la plainte et pour motif juste et connu desdit Consuls.

 

Item il est usité et accoutumé que toutes sortes de justices appartiennent aux Consuls, par exemple : amendes sur les bestiaux tant de nuit que de jour et pour le voisinage, et le jugement de ces faits revient aux Consuls ; institution de garde ou messeguier et sa destitution quand les Consuls jugeront à propos de s'en défaire, capture du bétail trouvé et amende ainsi qu'il a été dit. Enfin les Consuls, à l'exclusion du Seigneur, reçoivent le serment du messeguier.

 

Item il est usité et accoutumé que lorsque les Consuls sont à l'expiration de leur année, de concert avec les Consuls de l'année précédente ils ont le droit et le devoir de choisir les Consuls qui exerceront et administreront durant l'année suivante : le Seigneur ou son délégué doit recevoir leur serment dès que les candidats présentés sont reconnus suffisants.

 

Item il est usité et accoutumé que la forge appartient aux Consuls et à la Communauté de Frouzins franche et libre de toute redevance d'oublies et d'autre charge, quel que soit l'endroit où ladite forge se trouve placée, ou dans le Fort ou en dehors, sans préjudice du Seigneur s'il avait pour d'autres raisons, en ce même lieu, droit d'oublies.

 

Item il est usité et accoutumé que le chemin de ronde [Le cossier est le chemin de ronde du village, nécessaire au service des remparts et qui doit toujours rester libre pour le service de la place] est accessible à tous les habitants. Ceux-ci peuvent passer au-dessus et à l'entour des murailles soit la nuit, soit le jour, en temps de guerre et en temps de paix. La porte en doit rester ouverte afin que l'on puisse passer et repasser tout autour.

 

Item il est usité et accoutumé que tous les biens communaux de Frouzins et des alentours sont communs et demeurent disponibles aux habitants dudit lieu pour la dépaissance et pour l'usage qu'ils voudront en faire, à savoir : un pré appelé le pré de la Fome, le prè de Napioula, le Trépadou, la Barthe et ses dépendances, [?], le pré d'en Gémol, le [ ?] des Armelas ».

 

Dès que la lecture des Coutumes est achevée, Antoine Inardi. à genoux, tête nue et les mains posées sur le Missel, [ ?] et la Croix, prononça son serment. Les Consuls et les habitants jurent à leur tour observant un cérémonial identique.

Enfin le nouveau Seigneur de Frouzins prend ostensiblement possession du lieu en touchant le verrou de la porte principale du village et en entrant dans la maison commune.

 

 

 

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