M comme un Meilleur encadrement Médical
En 1737 dans le diocèse de Rieux (31), il y aurait eu 44 chirurgien et 15 barbiers, les médecins n’étant pas comptabilisés parmi les praticiens.
Il est à noter qu’après 1743, les métiers de chirurgien et de barbier sont bien séparés et il n’y aura plus de confusion entre les deux métiers (cela ne va pas se faire de suite bien sûr, il faudra attendre quelques décennies pour cela).
En tous les cas en 1755 il semblerait que les chirurgiens non barbiers (il y a donc encore à ce moment des chirurgiens barbiers) soient considérés comme des notables en Languedoc du moins :
« Les chirurgiens non barbiers exerçant uniquement la chirurgie jouiront des prérogatives et des honneurs attribués aux autres arts libéraux et qu’ils seront regards à l’avenir comme notables bourgeois dans les villes où ils feront leur résidence » (Lettre du subdélégué Amblard concernant le statut des chirurgiens – 18/10/1755).
Les chirurgiens vont peu à peu se spécialiser en obstétrique, délaissée par les médecins et former les sages-femmes.
A Tournefeuille (31) une enquête sur les sages-femmes indique qu’à la fin du 18ème siècle les matrones « ne sont pas capables de remédier au plus petit accident. C’est un secours qui manque dans la communauté , s’il n’était le secours de Monsieur Conte, maître en chirurgie du lieu, qui a remédié à beaucoup de circonstances désagréables toutes les fois qu’il a été appelé à temps ».
La loi du 19 ventôse an XI fera disparaître la séparation qui existait entre les médecins et les chirurgiens.
A côté des médecins se trouve une catégorie de praticien que l’on nomme les officiers de santé.
Au 19ème siècle ce sont des médecins qui n’ont pas le grade de docteur. Cette catégorie est née à la Révolution puisqu’en effet à partir de 1792, il est devenu possible d’exercer librement les professions de santé pourvu que les personnes concernées payent patente.
Les officiers de santé vont officier dans les villages essentiellement.
Une loi du 30 novembre 1892 abolira cette catégorie tout en laissant le droit aux candidats officiers en cours d’étude au moment de la promulgation de cette loi de les terminer et d’exercer nomalement.
Pendant ce temps les sages-femmes voient leur niveau de formation progresser avec notamment la création d’écoles. Ainsi en 1792 une école se crée à Toulouse : 36 femmes sont choisies, 7 pour le district de Saint Gaudens, 6 pour celui de Toulouse, 5 pur celui de Grenade, 4 pour ceux de Castelsarrasin, Rieux et Muret, 3 pour ceux de Villefranche et Revel.
Ce ne sera qu’au bout de 3 ans de formation que les maîtresses sages-femmes seront reçues.
Avec la disparition des praticiens de santé, le nombre de médecin va mécaniquement diminuer surtout dans les zones rurales. Les formations, meilleures, vont entraîner une augmentation des prix des praticiens, excluant ainsi une partie de la population d’une possibilité de recours aux consultations.
Les autorités vont ainsi devoir mettre en place une assistance médicale gratuite. Ce n’est pas quelque chose de nouveau. Il ne s’agit toutefois pas des hôpitaux et autres hospices qui, on l’a vu dans de précédents articles, ont comme mission principale d’accueillir les nécessiteux, indigents, pèlerins et marginal en tout genre.
Ceci étant sous l’Ancien Régime il existait des médecins gagés par les communautés mais leur rémunération ne leur permettait pas de vivre correctement. De ce fait il était très difficile d’en trouver.
Au 19ème siècle ces médecins ne sont pas nécessairement mieux rémunérés mais cette assistance médicale gratuite est mieux organisée : un médecin par arrondissement exerce gratuitement depuis 1805 ; les médecins chargés de la vaccination anti variolique inoculent gratuitement les enfants des familles pauvres au cours de deux tournées annuelles qu’ils effectuent dans leur canton. Ils doivent en lus vacciner gratuitement chez eux le premier dimanche de chaque mois les enfants des familles indigentes des communes de leur canton qui leur seront présentés entre 8h et 10h du matin.
Ils sont également obligés de se rendre à toutes les époques de l’année sur ordre des autorités locales dans les communes de leur canton où la petite vérole se déclarerait et d’y prescrire tout traitement curatif et préventif.
La mise en place de cette assistance gratuite, la meilleure formation globale des praticiens de santé va permettre un net recul de la mortalité surtout la mortalité infantile.
Mais les progrès médicaux au 19ème siècle ne sont pas encore à la hauteur de la violence de certaines maladies comme la variole qui en 1870 provoque une crise de mortalité très importante.
A Paris la variole est endémique depuis 1865 où elle fait 700 morts chaque année mais elle devient plus virulent en décembre 1869 provoquant la mort de 4200 personnes jusqu’en juillet 1870. L’épidémie prend de telle proportion sur tout le territoire que pour la première fois dans l’histoire de la médecine une conférence est organisée du 25 mai au 29 juin 1870 à Paris pour l’étudier et la combattre. Près d e500 médecins viennent de toute la France pour y assister.
Les populations sont pourtant vaccinées mais le vaccin n’est pas de bonne qualité. Et la guerre va entraîner des mouvements de population, de garnison et c’est ainsi que la maladie va se propager à une vitesse fulgurante dans toute la France.
George Sand en septembre 1870 fuit Nohant et cherche refuge dans la Creuse "pour fuir la variole charbonneuse qui s’est déclarée à notre porte et qui a enlevé le mari » d’une amie dont « le fils est malade aujourd’hui ».
Pasteur, réfugié à Arbois dans le Jura, pendant le siège de Paris, écrit début 1871 « que la petite vérole y fait des ravages épouvantables ».
Il faudra attendre la fin du 19ème siècle avec les travaux de Pasteur et les progrès médicaux fulgurants au 20ème siècle pour que réellement les taux de mortalité soient durablement bas.
Voir également l'article sur "se soigner autrefois".
Sources
Visages de la mort dans l'histoire du Midi Toulousain (4è-19ème siècle) sous la direction de Jean Luc Laffont
La variole et la guerre de 1870 de Gérard Jorland
Adolphe CLAVERIE
Adolphe est né le 15 septembre 1890 à Frouzins.
Son père s'appelle Jean Antoine Claverie, cultivateur, né en 1845. Sa mère s'appelle Jaquette Catala, née en 1846.
Il est châtain aux yeux verts et mesure 1.62m. Il a une cicatrice entre le nez et l'oreille gauche.
Adolphe sait lire, écrire et compter.
En 1910 il réside à Beaumont sur Lèze
Il est cultivateur à cette époque. On le retrouvera électricien en 1924, puis contremaître de la Société Pyrénéenne d'électricité de Toulouse en 1932, secrétaire en 1937.
A 24 ans il est mobilisé; on est le 3 août 1914. Il est affecté au 837ème RI
Il est caporal
Il est cité à l'ordre du régiment : "chef de pièce calme et résolu, s'est dépensé sans compter aux attaques des 17/18 et 19 avril 1917"
Il est à nouveau cité le 10 mai 1918 "chef de pièce 'un courage remarquable, a été blessé à son poste de combat". Il recevra la croix de guerre, 2 étoiles de bronze.
Le 29 avril 1918 il est en effet blessé par un obus au coude gauche, avec une plaie dans la région deltoïdienne gauche.
En 1921, il habite Aucamville, en 1928, Muret, en 1930 Mazamet, en 1932 Puylaurens, et en 1936 Grisolles.
Il épousera le 8 janvier 1920 à Toulouse Marie Castagné
Il mourra le 15 mai 1978 à Toulouse
L comme Louis Victor Gesta et le château de Verrières
A l’angle de l’avenue Honoré Serres et de la rue Godolin, en plein quartier des Chalets, se trouve un élément du patrimoine toulousain somme tout assez méconnu : le château de Verrières, connu aussi sous le nom de Castel Gesta.
De style néogothique avec ses tours et tourelles, ses balcons dentelés, ses fenêtres en ogive, ses ferronneries d’art et ses gargouilles et autres animaux chimériques, le château a été construit par Louis-Victor Gesta, maître-verrier toulousain. Ce dernier était un grand collectionneur d'antiquités et d'œuvres d'art, et «avait fait construire sa résidence à l'image d'un palais urbain médiéval crénelé et les couverts de toitures élancées, surmontées de magnifiques épis de faîtage».
Dans une pièce du château le maître verreir expose ses plus beaux vitraux comme L’Adoration des Mages d’après Albert Dürer ou celui de L’Entrée de Louis XI à Toulouse qu’il considérait comme son œuvre capitale. Il aménage également une Salle des Illustres et en confie la décoration picturale à Bernard Bénezet. Au sommet de l’escalier d’honneur s’ouvre une grande salle d’exposition peinte par le peintre toulousain Joseph Angalières.
Les ateliers Gesta, créés par Louis Victor en 1852 et dont le château fait partie intégrante, ont été primés lors de nombreuses expositions notamment l’exposition universelle de 1867 (deuxième prix).
« A cette époque, la manufacture est l’une des plus importantes de France et des milliers de vitraux sortent du faubourg avant de partir décorer plus de 8 500 églises aussi bien dans l’hexagone qu’à l’étranger » précise Christian Maillebiau, archiviste adjoint des Toulousains de Toulouse.
Le succès des ateliers est tel que le 8 mars 1867, l’archevêque de Toulouse, accompagné de ses vicaires généraux, visite la manufacture où se trouve exposé le vitrail Sainte Geneviève de Pibrac destiné au pape Pie IX.
Louis Victor Gesta sera même fait chevalier de l’ordre de Saint-Sylvestre par le pape.
Gesta est ce que l’on appelle un artiste industriel, ce qui lui valut un certain nombre de critiques : ces vitraux étaient en effet produits en série mais de très bonne qualité.
À la mort de Gesta en 1894, le château fut vendu à un négociant toulousain, Bernard Bordes puis aux soeurs de la Charité de Saint-Vincent-de-Paul, qui y hébergèrent des familles réfugiées durant la guerre.
Le château en 1913
Il fut ensuite transformé en centre d’apprentissage de la couture pour les jeunes filles sans emploi. En 1956, il devint un lycée d’enseignement professionnel.
En 1987, le château fut racheté par la Mairie de Toulouse qui y installa la classe d’orgue du Conservatoire supérieur national de musique.
Le 3 octobre 1991, l’État classe le château aux monuments historiques mais celui-ci est en piteux état, squatté et tagué depuis de nombreuses années, le terrain est en friche.
Le château en 2009 avant les travaux de réstauration
Il est racheté par un promoteur qui entame à compter de 2014 une série de travaux pour le réhabiliter et y aménager six appartements.
Le château en 2016
J comme Jolis noms de rue
Certaines rues de Toulouse ont des nom qui prêtent à sourire.
Voici l’origine du nom de certaines d’entre elles…
Le chemin Mal Clabel, pas loin de l’avenue Jean Rieux
Ce chemin était en fait mal pavée (mal clabel en occitan) mais un ouvrier a mal lu les directives et a transformé Mal en Maréchal d’où la naissance d’un officier imaginaire ….
Rue de la Verge d’Or, à côté de la place Arnaud Bernard
Le nom semble coquin et pour cette raison la rue fut renommée à plusieurs reprises mais en vain :
En 1794 elle est appelée rue l’Expérience.
En 1869, on lui donne le nom de rue de la Merci.
Le 13 août 1883, on proposa de l’appeler rue Delescluse.
Mais elle reste toulours la rue de la Verge d’or
Comment expliquer ce nom ?
Trois pistes possibles :
1/La Verge d’or est un « ancien nom de terroir, connu dès le XVe siècle », explique l’historien Pierre Salies dans son Dictionnaire des rues de Toulouse.
2/La verge d’or est le nom d’une plante aux nombreuses vertus médicales, le solidago, qui auraient poussé dans les cours d’immeubles de la rue ou dans le jardin d’Embarthe à proximité.
3/Il semble que cette rue au XVe Siècle se nommait « Carriera Virgam auri apud Vergadaux » en raison de la présence d’une probable échoppe. « Vergadaux » ne resistant pas au temps qui passe devient progressivement Verge d’Or
Le quartier des Trois cocus
Le terme de Trois-Coucuts (en occitan, c’est-à-dire trois coucous en français) est ancien puisqu’on le retrouve dans dans un bail datant de 1740.
La petite anecdote veut qu’à l’époque napoléonienne, le quartier était surnommé « Tres Coucuts » en raison d’une bâtisse seigneuriale, aujourd’hui disparue, qui était ornée d’une sculpture de trois coucous. Des soldats de Napoléon qui y étaient logés demandèrent aux habitants le nom du quartier. Ne comprenant pas l’occitan ils marquèrent sur leur carte « trois cocus ».
Pierre Salies dans son Dictionnaire des rues de Toulouse paru en 1989 privilégie également cette origine car en effet dit-il « quand on arrivait à ce quartier [il y a quelques années] on apercevait au sommet du pignon d’une vieille maison une pierre carrée encastrée dans la muraille. Sur cette pierre se trouvait dessinée la silhouette de trois oiseaux qui semblaient regarder les passants. Ces oiseaux représentaient trois coucous, en patois coucuts ».
Malgré cette origine tout à fait morale, au début du XXe siècle, il a été question de supprimer le nombre « Trois », ce chiffre étant désobligeant pour certains habitants de cette rue. Le maire de cette époque a tranché la question de façon tout à fait diplomatique :
« Voyons, répondit Albert Bedouce, ancien maire de Toulouse, en souriant, cela n’est pas sérieux ! D’abord, nul ne connait les cocus en question ! Ensuite, c’est pour vous une vraie chance que d’habiter un quartier comptant aussi peu de maris trompés. Ceci est tout à l’honneur de la vertu de vos épouses, et quel autre quartier de Toulouse oserait se vanter de n’en avoir que trois ? Allez, allez, conclut-il, gardez vos trois cocus et essayez bonnement de n’en pas augmenter le nombre ! »
Chemin de Lanusse
Le chemin de Lanusse est situé dans le quartier des Trois-Cocus, au nord du parc de la Maourine. Il fait référence tout bonnement à François de Lanusse, capitoul au 17ème siècle, qui possédait un château et des terres à Croix-Daurade.
La famille de Lanusse est d'origine gasconne, du Béarn plus exactement et le terme Lanussa qui est un mot occitan fait référence à une mauvaise lande.
Chemin de la Levrette
Cette impasse se situe près du lac de Sesquière. En Langue d’oc, le chemin de la Levrette fait uniquement référence au petit du lièvre.
Rien de bien coquin …
Rue de la Hache
Rue de la Hache
Considérée comme une voie privée, un habitant en fit condamner l’accès en 1632 par une porte à l’angle de la rue du Castel.
N’ayant pas d’issue, elle fut longtemps négligée, et vers 1920 encore, nul éclairage n’y était prévu, rappelle Pierre Salies, dans son Dictionnaire des rues de Toulouse. À la Révolution, elle devient la rue de la Hache.
Rue de l’homme armé
Le "sauvage"
La rue de l'Homme-Armé tire son nom d'une auberge du Sauvage, établie dans la rue à la fin du XVe siècle (actuels no 16 et 18, et no 23 de la rue des moulins). C'est le propriétaire de l'auberge, Peyronet Delfau, qui fit sculpter, comme enseigne, un « sauvage », c'est-à-dire un indien, armé d'une massue. Ce n'est qu'au XVIIIe siècle que le nom devint rue de l'Homme-Armé[].
Chemin du sang du serp (quartier des Ponts Jumeaux)
Ce chemin date du 16ème siècle et doit son nom aux serpents et à son sang. En effet, à l'époque ce chemin traversait des champs infestés de serpents (d'où Serp).
L'évocation du sang n'est qu'une succession de déformation du mot toulousain "cami" (chemin) qui donnera "camp del Serp" qui se transformera ensuite en "Sang du Serp".
Rue du coq d’inde (centre ville historique)
Rue du Coq d'inde
Le nom de la rue du Coq-d'Inde est apparu au milieu du XVIIe siècle. Il vient d'une auberge (au n°3) qui avait pour enseigne un « coq d'Inde », c'est-à-dire un dindon, animal venant des Amériques
Rue des Gestes, (centre ville historique)
Les Gestes étaient une riche famille de Toulouse. Leur demeure était située derrière l’actuelle place du Capitole. Des membres de cette famille furent Capitouls.
La rue de la Pomme (centre ville historique)
Elle tient son nom de l’auberge de la Pomme qui avait son enseigne au n°40
Rue du Poids de l’huile (centre ville historique)
Ce nom vient du Poids de l'huile qui se trouvait dans la maison commune (le Capitole) où étaient pesées les denrées alimentaires entrant en ville
Enclos de la Maison commune au 18ème siècle : 1 = façade du Capitole, 13=poids de l'huile
Rue des Trois Renards (proche du musée Saint Raymond)
Anciennement «carriera de banquetis ou banquos sancti Saturnini » ou rue des bancs puis qu’elle comprenait des étals étroits où commerçants, maraîchers et poissonniers présentaient leurs produits. C’est au XVIIe que la rue prit le nom actuel grâce à l’installation d’une auberge qui avait pour enseigne « les trois renards ».
La rue de l'Écharpe
Rue de l'écharpe
116 m de long et entre 4 et 7m de large, près de la place d’Assézat tient son nom de l'hôtellerie de l'Écharpe, établie dans la rue en 1755 (actuel no 3).
Rue du May (centre ville historique)
Rue du May
Ce nom vient de l'hôtel Dumay que possédait Antoine Dumay, docteur de la Faculté de médecine de Toulouse en 1596
I comme Institutions hospitalières de Toulouse sous l'Ancien Régime
L'Hôtel Dieu et le dôme de la Grave
La Grave
La construction des institutions hospitalières sur la rive gauche en bordure de la Garonne, remonte au XIIè siècle. Deux ensembles vont émerger de quelques maisons de charité, couvents et autres hôpitaux établis sur la rive gauche tout au long du Moyen Age.
HÔTEL DIEU SAINT JACQUES
L’hôpital Sainte-Marie de la Daurade est édifié entre 1130 et 1140 en face de l’Eglise de la Daurade implantée sur la rive droite. Un pont (le pont de la Daurade, voir ci après), dont l’existence est attestée en 1150, mais qui a aujourd’hui disparu, reliait les deux établissements.
Une maison de charité, destinée à accueillir les voyageurs et pèlerins, est établie en amont de l’hôpital Sainte-Marie. Ce sera l’Hôpital Nouvel. Entre les deux établissements se trouve l’entrée du pont de la Daurade disparu au XVIè siècle, mais dont on conserve encore aujourd’hui, la dernière arche de la rive gauche.
C’est au début du XIVè siècle, en 1313, que les deux établissements Sainte-Marie et l’Hôpital Nouvel adoptent le même nom : “l’hôpital Saint-Jacques” ou “Hôpital du bout du pont ; ils sont dirigés par la confrérie Saint Jacques.
Emplacement des bâtiments au 13ème siècle
de part et d'autre du pont de la Daurade
Quid de ce fameux pont de la Daurade ?
L’hôpital Saint Jacques est relié à Toulouse par deux ponts à cette époque : le pont de la Daurade ou pont couvert ou encore « Pont neuf », pour le distinguer du deuxième pont de Toulouse, le Pont de la reine Pédauque (du nom d’une reine wigothique légendaire qui aurait eu son palais au pied de l’eau ) ou Pont vieux.
Extrait du plan de Boisseau - 1645 - Toulouse
Le pont de la Daurade va être endommagé à de nombreuses reprises du fait notamment des inondations. Aussi il devient vital de construire un nouveau pont : la construction de celui-ci, le futur “Pont-Neuf”, est décidée dès 1541 et Jean de Mansencal, président du Parlement de Toulouse, pose solennellement la première pierre de l’ouvrage le 7 janvier 1544.
Les travaux de construction du Pont-Neuf se poursuivront jusqu’en 1632, date de sa mise en circulation et à partir de 1639, débutera la démolition du pont de la Daurade déjà très endommagé par la crue de 1608 et qui est devenu entre temps « Pont Vieux ».
Les travaux de construction du pont de la Daurade ont commencé dans les années 1130 et se sont achevées en 1179. Il était traversé par les nombreux pèlerins de Saint Jacques de Compostelle et son emplacement était tout à fait pertinent du fait de la présence de l’hôpital Sainte Marie (ne pas oublier qu’à cette époque ce que l’on appelle « hôpital » n’est en fait qu’un lieu d’accueil pour les nécessiteux notamment les pèlerins.
Neuf arches, 8 piles en rivière. La dernière arche est encore visible en face de l’hôtel Dieu, adossée à sa façade. Ce pont se couvrent très vite de maisons en bois comme il est habituel d’en voir à cette époque.
Et les capitouls décident à partir de 1480 de couvrir le pont d’un toit et d’édifier sur ce pont, à côté des maisons en bois, des échoppes qu’ils donnent en location. Le pont de la Daurade devient alors le « Pont-Couvert », que l’on peut voir sur le plan de Melchior Tavernier, en 1631, à côté du pont de Clary, du nom de François de Clary, président du parlement de Toulouse : il s’agit d’un pont de bois provisoire érigé en attendant la mise en service du Pont-Neuf et qui sera finalement emporté par les eaux cinq ans plus tard.
Extrait du plan de Tavernier - 1631
Toulouse et ses 3 ponts : le pont de la Daurade, le pont Vieux, le pont Clary
Entretemps, en 1554, les capitouls décident de réunir les “petites charités” de la ville en un seul établissement. L’idée est d’éliminer le plus possible les foyers d’infections potentiels.
C’est ainsi qu’est créée la “Maison Dieu” ou “Hôtel-Dieu” Saint-Jacques qui est désormais l’établissement hospitalier le plus important de la ville.
Suite à un grave incendie, le 7 février 1574, il est en grande partie détruit et la reconstruction se fait sensiblement suivant le plan qu’on lui connaît aujourd’hui.
L'Hôtel Dieu au 17ème siècle
Le Pont de la Daurade est détruit, il ne reste que les piles
Au 18ème siècle, on reconstruit la grande aile le long de la Garonne qui se prolonge presque jusqu’au Pont-Neuf et le mur situé entre le Pont et l’Hôpital est bâti en 1710. A l’emplacement de la rue qui prolongeait le pont de la Daurade est installé en 1716 un grand escalier d’honneur, fermé du côté rivière par la grande verrière qui évoque toujours l’une des voies majeures du Toulouse médiéval.
L'Hôtel Dieu au 18ème siècle
La dernière pile du pont médiéval qui subsiste est aménagée en terrasse en 1734 pour permettre aux convalescents de se promener vers le fleuve.
L'hôtel Dieu à la veille de la Révolution
On voit le promontoire servant de promenade
La façade sur la Garonne se déploie alors de part et d’autre de la pile du pont de la Daurade qui est encore débout. Cette façade, longue de 130 mètres, est légèrement courbe et plonge directement dans le fleuve.
L’Hôtel Dieu conservera jusqu’au bout sa vocation première : l’accueil des pèlerins et des nécessiteux au contraire de La Grave qui, on va le voir, va devenir au 17ème siècle un lieu de renfermement des pauvres et des mendiants.
En 1793, l’Hôtel Dieu est rebaptisé “l’Hospice de l’Humanité”
L’Hôtel Dieu héberge aujourd'hui le centre administratif du CHU de toulouse ainsi que l’Institut européen de Télémédecine, le centre européen de recherche sur la peau et les épithéliums de revêtement ainsi qu'un musée d’histoire de la médecine.
Ce musée est une petite merveille. Je vous conseille la visite guidée qui est faite par un bénévole dont l’érudition est absolument captivante !!
LA GRAVE
La construction du futur Hospice de la Grave, remonte probablement à l’extrême fin du XIIè siècle puisqu’il est mentionné dans une charte du comte Raymond V en 1197. Il est érigé en aval de l’Hôpital Sainte-Marie de la Daurade à quelques centaines de mètres sur les graviers de la Garonne (d’où son nom), dans le quartier Saint-Cyprien. Il ne reste rien de ce premier hôpital aujourd’hui.
Deux établissements occupent alors les lieux de ce que sera plus tard notre hôpital la Grave: un petit hospice et un couvent de frères bénédictins issus de l’abbaye de Moissac.
Entre 1508 et 1544, le futur Hôpital de la Grave est transformé et agrandi, notamment pour permettre l’accueil des pestiférés (la peste ravage en effet Toulouse, emportant près de 3000 personnes dans les premières années du siècle).
Il va s’appeler hôpital Saint-Sébastien (du nom du Saint protecteur contre la peste), le long de la Garonne et rejoignant, à l’ouest, le rempart et la tour Taillefer. Cette tour fut construite entre 1516 et 1517 ; il s’agit en fait de l’une des 4 tours qui flanquent le rempart englobant le faubourg St Cyprien, surplombant la Garonne à environ 35 m de hauteur.
La Tour Taillefer est à l’origine une tour d’artillerie servant de réserve de poudre et de munitions. Elle fut affectée à l’accueil des pestiférés, des mendiants et des épileptiques car son isolement en fait un lieu particulièrement bien adapté pour mettre à l’écart les malades victimes d’épidémies, les pestiférés notamment ; par ailleurs elle compte peu d’ouvertures et se dresse à l’ouest, ce qui évite à la ville les effluves malodorants les jours de vent d’Autan.
La tour Taillefer au premier plan
Les années qui vont suivre vont être traumatisantes pour la population : épidémies, guerres, famines, … Toutes ces catastrophes vont jeter à la rue nombre de personnes. La pauvreté et la misère vont conduire à une augmentation de la délinquance qui va elle-même mettre en danger l’ordre public.
Pour donner un ordre d ‘idée, sur une population estimée à 40 000 habitants (après l’épidémie de peste de 1628/1631 qui a fait 10 000 morts), Toulouse compte 5 000 mendiants .
C’est ainsi qu’à partir des années 1630-1640, va se mettre en place partout en France ce que l’on va appeler le « Grand Renfermement ». Cette politique conduit les autorités à interner d’office les pauvres, de façon à les « soigner, instruire et relever leur niveau moral ». Voir article sur ce sujet ICI.
L'Aumônerie Générale de la ville, crée en 1647, et qui sert de refuge volontaire ou imposé, aux pauvres et aux mendiants de la ville, est installée à l’Hospice de la Grave qui va devenir “l’Hôpital Général Saint-Joseph de la Grave” préfigurant ainsi l’édit royal de 1662 de Louis XIV qui décide d’imposer l’ouverture de ce type d’établissement dans toutes les villes du Royaume.
C’est ainsi que l’Hôpital Saint-Sébastien des Pestiférés perd sa vocation d’assistance aux pestiférés et malades ; il est désormais destiné à « renfermer » mendiants, voleurs, filles publiques, « fous », vieillards démunis, orphelins et enfants abandonnés.
On met en place des boutiques et des manufactures dans lesquelles les pauvres travaillent. Le produit de ce travail représente une petite partie des revenus de l’Hôpital.
Une représentation de “L’hospital de la Contagion” établie par Colignon en 1642 nous donne une idée de ce à quoi ressemblait l’hôpital de la Grave à cette époque … il lui manque son dôme si caractéristique.
Hospital de la Contagion - 1642
L’hôpital est agrandi dans les années 1660 et 1687.
Dès 1684 et 1686, la construction d’une nouvelle chapelle, plus spacieuse, plus éloignée du fleuve, devient nécessaire. L’emplacement choisi pour le futur bâtiment, est un jardin situé devant l’hôpital et appartenant à un particulier, le sieur Rose. Mais sa réalisation n’aura lieu qu’aux siècles suivants.
Aux abords de l’Hôpital de la Grave l’environnement est modifié en 1719, par le déplacement du gué du Bazacle décalé et prolongé vers l’Hôtel-Dieu. Ce changement a pour conséquence de provoquer la montée des eaux du fleuve le long de l’aile de l’Hôpital de la Grave où se trouve probablement la chapelle.
En 1717, l’archevêque de Toulouse, Mgr Henri de Nesmond lègue à l’Hospice de la Grave tous ses biens dans le but de construire une nouvelle Chapelle : enfin les travaux peuvent commencer.
En 1793, la Grave est rebaptisée “l’Hospice de Bienfaisance”.
Vers 1797, l’Hôpital de la Grave est considérablement agrandi par l’annexion de l’ancien couvent des Dames des Clarisses établi depuis l’époque médiévale au sud de l’hôpital et qui avait été préalablement réquisitionné et transformé en hôpital militaire à la Révolution sous le nom d’Hôpital "Christophe Colomb".
Le chantier de la chapelle de l’hôpital de la Grave n’est toujours pas terminé au XIXè siècle.
Le Dôme de la Grave
Le premier pont suspendu Saint-Pierre est réalisé en même temps que le percement de la rue du même nom et l’ouvrage est ouvert à la circulation en 1852 .
Le pont suspendu Saint Pierre et la Grave en arrière plan
Au cours de l’inondation de 1875, les eaux de la Garonne montent jusqu’au dessus du premier étage de l’hôpital et provoquent de nombreuses destructions à l’intérieur des salles. Les cours et les jardins sont ravagés, ensevelis sous quarante centimètres d’eau et au cours de la crue, le personnel comme les malades se réfugient sur le toit de l’orangerie .
Inondations de 1875
Devant l’ampleur de la catastrophe pour l’ensemble du quartier Saint-Cyprien, il est prévu de détruire le Pont-Neuf, l’Hôtel-Dieu et une partie de l’Hospice de la Grave pour permettre l’élargissement du lit de la Garonne. Grâce à l’Association des Toulousains de Toulouse et une partie de la population, ce projet fut abandonné. Mieux que cela, le site du Pont-Neuf comprenant les vestiges de ponts plus anciens situés en amont et en aval, l’Hôtel Dieu Saint Jacques et l’Hospice de la Grave « faisant partie de la perspective des rives de la Garonne » sont classés aux Monuments Historiques en 1932.
Les projets de démolitions des ouvrages et édifices au bords de la Garonne sont définitivement abandonnés le 16 mars 1933.
Une note accompagnant les débats qui ont eu lieu autour du devenir de ces bâtiments indique :
C’est un paysage admirable. Les ingénieurs ont déclaré qu’ils ne comprennent pas la beauté de l’hôpital. Mais que pourraient-ils mettre à la place qui soit plus noble et plus grand et la silhouette du dôme de la Grave ne rappelle t- elle pas des souvenirs de Florence ?
La Grave à droite et tout à gauche l'l'Hôtel Dieu
Pour bien visualiser les deux établissements : la Grave à gauche et Saint Jacques à droite
Sources
http://france.jeditoo.com/MidiPyr/toulouse/Toulouse-hotel-dieu.htm
https://www.chu-toulouse.fr/-histoire-des-hopitaux-de-toulouse-
MONOGRAPHIE HISTORIQUE - SITE DE L’HÔTEL-DIEU SAINT-JACQUES (FAÇADE EST) ET DE L’HOSPICE DE LA GRAVE par Mesdames FUCHS Magali et MARTIN Élisabeth
H comme Hospice St Raymond
Le plus ancien hôpital de Toulouse semble être l’hospice de saint Raymond édifié entre 1071 et 1080 par Raymon Gairard pour les pauvres et nécessiteux, juste à côté de la toute jeune basilique Saint Sernin (qui sera consacrée en 1096).
Attention à l'époque ce que l'on appelait hôpital n'était en fait qu'un lieu d'accueil des nécessiteux malades ou non. Sa vocation première n'était donc pas le soin aux malades. Voir cet article pour plus de détail.
Saint Raymond au 19ème siècle
Dans le cartulaire de l’abbaye de Saint Sernin de Toulouse, on peut plus précisément lire que cette maison de charité a été fondée par le comte Guillaume IV (1060-1093), l'évêque Isarn de Lavaur (1071-1105), également prévôt de Saint-Sernin, Raymond Guillaume de Marquefave, sacriste du monastère, ainsi que par le prieur Pierre Ponchet et le chanoine Raymond Pierre.
Le comte Guillaume, son épouse, la comtesse Mathilde, et l'évêque Isarn confient la direction de l'établissement à un personnage nommé Raymon Gérard (ou Géraud) qui sera connu plus tard sous l’orthographe de Gairard ou Gayrard. Il est mentionné dans ce cartulaire ainsi que dans d’autres documents de l’époque non comme le fondateur de l’hospice mais comme responsable de cette institution. Dans d’autres documents, Raymon Gairard apparaît comme « capiscol » ou écolâtre de Saint-Sernin (un écolâtre est le maître d’une école monastique ou cathédrale).
Raymon Gairard mourra avant 1122 (a priori le 3 juillet 1118) et fera l’objet d’un culte qui remonterait au 27 juin 1122.
L’hospice peut accueillir à cette époque 13 pauvres.
En 1229 l’université de Toulouse voit le jour ; il devient nécessaire de trouver où loger et nourrir les étudiants pauvres. C’est ainsi qu’en 1233 le pape Grégoire IX ouvre le bâtiment aux étudiants pauvres.
L'inventaire des biens de Saint-Sernin dressé du 10 au 14 septembre 1246 sous l'autorité de l'abbé Bernard de Gensac (1243-1263) déclare d’une part que la chapelle Saint-Jean (dans laquelle est enterré Raymon de Gérard) est passée sous le vocable de Saint-Raymond (elle sera détruite en 1852/1853) et d’autre part que dans la liste des biens de l'hôpital figurent alors notamment 101 matelas dont 49 de plume, 41 couverture, 47 coussin, 54 oreiller dont 50 de plume, 56 lits de bois et 36 draps.
En 1250 l’évêque d’Agen Guillaume, ancien inquisiteur dominicain donne à l’hospice une maison voisine que l’on a retrouvé lors des fouilles de 1994/1996. Cette maison achetée par l’Inquisition quelques années avant, servait de prison pour les hérétiques supposés ou convaincus d’hérésie.
Probablement vers 1403 ou même peut être avant, le bâtiment devient un collège qui va pouvoir accueillir 16 étudiants boursiers puis seulement 10 en 1675.
Entre temps le bâtiment a été partiellement détruit en 1523 par un incendie ; il fut reconstruit par l’architecte Louis Privat.
Saint Sernin et le collège Saint Raymond en 1760- Dessin de Pierre JOseph Wallaert
Lors des fouilles de 1994/1996 on a retrouvé entre autre chose deux murs épais de 60 cm datant du 11ème siècle ainsi qu’un mur appartenant à une maison voisine identifiée comme celle donnée par l’évêque d’Agen.
À la Révolution, le collège se trouva abandonné à la suite de la suppression de ces institutions. La Ville de Toulouse l'achète en 1836 pour l’utiliser comme écuries et caserne.
En 1852/1853, lors du réaménagement de la place Saint Sernin, le collège et ses annexes sont détruits. Seul subsiste le bâtiment qui aujourd’hui abrite le musée Saint Raymond. Viollet Le Duc le restaurera en y faisant des ajouts non historiques comme les cheminées crénelées. IL sera réaménagé en 1946/1950 et l'essentiel des ajouts de Viollet Le Duc seront supprimées.
Avant de devenir un musée en 1892 il servira de presbytère jusqu’en 1890.
Musée de Saint Raymond
Sources
Les fouilles du musée Saint-Raymond à Toulouse de Pierre Garrigou Grandchamp
Mémoires de la Société Archélogique du Midi de la France – Tome LVII – 1997 - LES FOUILLES DU MUSÉE SAINT-RAYMOND À TOULOUSE (1994 -1996) par Quitterie CAZES, C. ARRAMOND, avec la collaboration de S. BACH (anthropologie),L. BOUOARTCHOUK (étude de mobilier), CABA (recherches historiques) et L. GRIMBERT (dessins)
G comme Galetas, loges et autres taudis
Les pauvres de l'Ancien Régime habitent un habitat précaire dont les noms que l’on retrouve dans les compoix sont assez évocateurs …
- « mesons basses et pauvres »
- « bouges de maisons »
- « maisonchielles » à Douai (59)
- « maisoncelles » (Calais)
- « logettes »
- « borda » dans le Midi (équivalent d’une cabane)
- appentis
Ces logements sont souvent sans étage, de plein pied sur rue et sont le lot commun des pauvres de la ville.
On trouve aussi souvent des baraques faites d’un assemblage de planches de moins de 5m2 tassées entre les contreforts d’une cathédrale ou contre les remparts de la ville.
Au fond des impasses , dans les caves ou au dernier étage des immeubles on ne trouve guère mieux : de véritables tanières que l’on retrouve tout aussi bien dans les arrière-cour de maisons bourgeoises et cela jusqu’au 19ème siècle et même après (voir article ICI )
Remontons le temps jusqu’à la fin du 13ème à Bruges : Jean Froissart loge dans « une povre maisonnette enfumée, ossi noire que atremens de fumier de tourbes et ny avait en celle maison fors le bouge devant et une povre ceute de veille toille enfummée pour esconcer le feu, et apr dessus un povre solier auquel on montait par une eschelle de sept eschellons. En ce solier avoit povre literon où li povre enfant de la femmelette gisoit . »
Au 17ème la situation ne s’est guère améliorée : à Lille nombre de cours bordées de « maisonnettes » avec une densité moyenne de 7 à 10 habitants par maison. Le surpeuplement peut atteindre des chiffres assez hallucinants : au 314 de la rue des Etaques vivent 25 personnes, au 66 rue Five, 21 personnes, au 15 de la rue Croquet, ce sont 16 personnes qui vivent ensemble.
La promiscuité est encore aggravée par la faible taille du logement. Ainsi fin 18ème siècle à Lyon, dans un immeuble du quartier Saint Vincent, 20 locataires se partagent une surface de 816m2 soit une moyenne inférieure à 41m2 par logement ; près de 100 personnes vivent dans cet immeuble qui disposent donc de 8m2 chacune en moyenne. A cela s’ajoute le fait qu’il n’y a pas de chauffage, que les fenêtres sont recouvertes de papier huilé, que les toilettes sont méconnues …
Et que dire des femmes abandonnées ou veuves qui habitent les caves avec leurs enfants ; voir ICI.
Sources
Pauvres et marginaux au Moyen Age de Jean Pierre Leguay
Chavatte, ouvrier lillois de Alain Lottin
Quelques remarques sur l’habitat urbain, l’exemple de Lyon au 18ème siècle de Maurice Garden
F comme instruction des Filles
Comme nous l’avons vu dans l’article sur l’alphabétisation, l’école et le catéchisme sont les outils privilégiés pour façonner les têtes et remettre sur le droit chemin de l’Eglise les égarés (protestants).
Sur ce point aucune différence de principe n’existe entre filles et garçons au 16ème siècle et au début du 17ème siècle. Mais soyons pragmatique, la pauvreté des moyens éducatifs ne permettait pas non plus d’avoir deux écoles sur un même lieu, une pour les filles et une pour les garçons.
Cependant au fur et à mesure que nous avançons dans le 17ème siècle les évêques deviennent de plus en plus hostiles à la mixité des écoles, jugée immorale.
Les écoles rurales étaient financées par des systèmes divers (portion de la dîme, revenus de fondations ... Leur activité est saisonnière et la qualité de l’enseignement n’est pas nécessairement à son meilleur niveau.
Les écoles urbaines sont plus nombreuses, tenues par des religieux/religieuses le plus souvent.
Les couvents par exemple, notamment des Ursulines, auront la vocation de devenir des internats non pour recruter des religieuses mais pour former « les mœurs des filles à la bienséance et honnêteté ... ».
Il est à noter que l’objectif principal des religieuses éducatrices n’est pas l’éducation mais l’enseignement de la doctrine chrétienne et des bonnes mœurs, « réprimant la curiosité des esprits pour les accoutumer à traiter les choses divines avec beaucoup de respect ».
L’éducation des filles reste secondaire même dans l’esprit des philosophes des Lumières
« Ainsi toute l’éducation des femmes soit être relative aux hommes. leur plaire, leur être utiles, se faire aimer et honorer d’eux, les élever jeunes, les soigner grands, les conseiller, les consoler, leur rendre la vie agréable et douce : voilà les devoirs des femmes de tous les temps et ce qu’on doit leur apprendre dès l’enfance ». Extrait de L’Emile de Rousseau
La Révolution fermant les couvents, comment instruire les jeunes filles ? Tout en sachant que cette époque ne révolutionna pas l’éducation : les rôles de l’homme et de la femme étant différents, leur formation doit être différente. Mirabeau dira même que les filles doivent rester sous la garde de leur mère.
Talleyrand excluera la gente féminine de l’éducation qu’il préconise aux enfants et jeunes gens du fait de « leur constitution délicate, leurs inclinations paisibles, les devoirs nombreux de la maternité ». Il ne leur accorde que l’instruction élémentaire jusqu’à 8 ans et ensuite les jeunes filles rentreront chez leur mère apprendre ce qui leur est nécessaire…
Pour Condorcet en revanche l’instruction doit être donnée en commun, et les femmes ne doivent pas être exclues de l’enseignement. Idée novatrice mais elle ne sera pas retenue.
Condorcet
Condorcet estimait que les femmes ainsi instruites pouvaient mieux surveiller l’instruction de leurs enfants. Il affirmait aussi que les femmes avaient les mêmes droits que les hommes à l’instruction publique.
L’épisode révolutionnaire passé les congrégations et ordres religieux reviennent et reprennent en main l’éducation des filles dans le même esprit de maintenir la femme dans son rôle d’épouse et de mère.
Vers 1860 Victor Duruy ministre de l’instruction publique sous Napoléon III propose d’ « organiser l’éducation des filles car une partie de nos embarras actuels proviennent de ce que nous avons laissé cette éducation aux mains de gens qui ne sont ni de leur temps ni de leur pays ».
Victor Duruy
En 1866 Victor Duruy adresse une lettre à l’impératrice pour lui faire part de ses préoccupations : « L’Impératrice voudra bien d’abord remarquer qu’en France il n’y a pas d’enseignement supérieur pour les femmes … Je ne voudrais pas en faire des bas-bleus ais l’influence de la mère sur l’éducation du fils et sur la direction de ses idées est trop grande pour qu’on ne s’inquiète pas de voir les femmes rester étrangères à la vie intellectuelle du monde moderne ».
Notons que c’est grâce à l’impératrice Eugénie que la première femme médecin a pu accomplir sa scolarité et soutenir sa thèse : Madeleine Gebelin, épouse Brès (1842-1921).
Madeleine Brès
En 1867, Jules Simon, philosophe et homme d’état français, né en 1814 à Lorien et mort en 1896 à Paris, prononce le discours suivant :
« Les filles même dans les pensionnats les plus élevés reçoivent une instruction futile, incomplète toutes d’arts d’agrément mais rien de sérieux et d’élevé. Elles que la nature a douées d’une intelligence si ouvertes, d’un tact si sûr, d’une sennsibilité si fine et délicate, qui sont faites pour comprendre ce qu’il y a de plus grand dans les lettres et pour s’y plaire, qui seraient pour nous des compagnes d’études si utiles et si charmantes nous les réduisons à n’être que des idoles parées ».
Jules Simon
La loi du 10 avril 1867, portée par Victor Duruy va enfin donner sa place à l’instruction des filles :
Toute commune de plus de cinq cents habitants (et non plus de huit cents habitants comme c'était le cas auparavant) doit se doter d'une école publique pour les filles, qui peut être une section au sein de l'école communale. Si l'école est mixte – c'est souvent le cas dans les petites communes –, une femme est nommée par le Préfet pour les travaux d'aiguilles pour les filles. Le financement est assuré non par l'Etat mais par les Communes. Les caisses des écoles sont instituées ; ce sont des cagnottes, composées de cotisations volontaires et de subventions de la commune, destinées à encourager la fréquentation des élèves par des récompenses et à aider les familles les plus pauvres lorsque la commune ne prend pas entièrement à sa charge les frais de l'école.
Mais en pratique, ce fut un échec, peu de filles fréquentant les cours dispensés : hostilité cléricale, manque d’intérêt de la majorité des familles pour l’instruction des filles, difficulté matérielle à entretenir des institutrices.
Mais le processus est lancé. Le 21 décembre 1880 est promulguée la loi qui fonde l’enseignement secondaire des jeunes filles. Cet enseignement est différent de celui donné aux garçons et n’est pas sanctionné par le baccalauréat ; IL est moins long (5 ans au lieu de 7 pour les garçons) ; le latin et les mathématiques sont enseignés de manière rudimentaire car la jeune fille n’a pas besoin de ces matières.
Six mois plus tard, l’école normale supérieure site de Sèvres est créée afin de former des professeurs femmes.
Ecole de Sèvres
Chambre d'élève à l'école de Sèvres
En 1914 les lycées, collèges et cours secondaires de jeunes filles comptent 38000 élèves (100 000 garçons fréquentent l’école à cette époque) ; 20 ans plus tard ce nombre s’élève à 60 000.
L’instruction des filles a évolué et commence à rentrer dans les mœurs. Mais à la veille de la première guerre mondiale, n’oublions pas que cette instruction n’est pas destinée à donner un travail à la femme ni à favoriser son épanouissement intellectuel. L’idée reste toujours que cette éducation lui soit utile dans son rôle d’épouse et de mère.
Suite dans un prochain article …
Sources
L’éducation des filles en France au 19ème siècle de Françoise mayeur
E comme Enfants abandonnés
L’hôpital général reçoit les enfants orphelins, les enfants qui sont abandonnés ou ceux qu’on leur confie tout simplement.
Ainsi à Pau :
« En 1776, « un enfant Etienne âgé de deux ans dont la mère est morte et qui est sans parens ny aucune personne qui en ait soin »
En 1779 « Antoine dit Vincent âgé d’environ 3 ans , son père était étranger, cieur de long qui étant décédé à Pau, son épouze chargée de deux enfants mendiaient tous les trois et cette pauvre femme étant morte subitement, une personne se chargea de l’ainé des enfants âgé de 6 ans ,le dit Vincent fut reçu à l’hôpital »
L’hôpital reçoit aussi des enfants délaissés : le 1er novembre 1767 l’hôpital accepte de prendre « une fille Julie, 6 ans que sa mère est morte chez le nommé Lestanguer, aubergiste à la rue de Polidor, commis à Mr Berdoulet , le père de cette fille est un faiseur d’instruments pour la musique, ayant laissé sa femme malade pour s’aller chercher de l’ouvrage pour gagner son pain, il n’a plus paru, ainsi cette fille a été reçu à l’hôpital en même temps qu’une autre fille, …. sœur de celle cy »
En juillet 1780, l’hôpital accepte de se charger du fils d’un ancien décrotteur devenu marchand de faïence qui, « ayant fait faillite s’est évadé »
En janvier 1781, l’hôpital se charge du fils d’un perruquier : la mère morte, le père s’en est allé « on ne sçait où » et l’enfant « est sur le carreau, il se retire chez le misérable Jean Ligues, son grand père, homme âgé vieux et sans ressource »
En 1783 une nourrice vint se plaindre de ce que » le nommé Labarthe fabricant de papier peint et habitant chez Jeanne Dufourc près du collège de Pau » s’était enfui en Espagne en lui laissant son fils
En 1783 toujours une femme se présente chez un jurat « portant un enfant de sexe féminin … elle dit qu’elle était chargée de nourrir le dit enfant de l’âge de 9 mois , qu’elle était absolument sans lait et d’une misère extrême, que la mère du dit enfant qui avait été établi à Pau avait décampé de la ville depuis cinq semaines lui devant deux mois et demi de nourrissage ».
En 1764 le curé et les jurats demandent à l’hôpital de se charger de Cécile 3ans et de sa sœur Marguerite Lucie 18 mois dont « le père et la mère sont laissés sur le pavé ».
En août 1781, le sieur Cazaux, chirurgien, i ntervient pour que Pierre, fils naturel de Chinette de Guilhamet soit reçu à l’hôpital, la mère « étant sans lait … et dans un état de misère à ne pouvoir subsister elle-même qu’avec peine… ».
Et bien sûr il y a tous les enfants exposés. A Pau par exemple en 1789 128 enfants sont exposés ; parmi eux 32 ont moins d’un jour, 26 moins de 8 jours, 51 entre 9 jours et 6 mois.
Le taux de mortalité de ces enfants est énorme : un peu plus de 8 sur 10. Cette mortalité est due à la conjonction de plusieurs facteurs : les conditions de grossesse, les conditions de l’exposition (accroché à un arbre, enfoui dans un tombereau, à peine enveloppé de quelques chiffons, couvert de haillons, enveloppé dans un mauvais morceau de cape brune… mais surtout les conditions de prise en charge : les enfants sont gardés au milieu de tous les autres laissés pour compte, sans soins, hygiène et nourriture adaptée.
Cosette - 1862
Ce sont aussi de jeunes enfants que l’on trouve errants et qui sont « capturés » pour être remis au dépôt de mendicité le plus proche : ainsi le 4 avril 1782 sont pris Jeanne 7 ans et Pierre son frère, 2 ans. Un an plus tard, le 5 juin 1783 leur mère Hélène est à son tour arrêtée. Elle accouche d’un enfant, Jean Paul, « fils naturel du nommé Jean Demonain, tisserand ». Il mourra le 12 mai 1790 à l’hôpital. Jeanne est placée en 1786, à 11 ans mais s’enfuit , elle est reprise quelques mois plus tard comme vagabonde. Pierre placé à l’hôpital sera repris par sa mère.
Ces enfants enfermés dans les dépôts pour cause de mendicité se révèlent être une aubaine pour des manufacturiers en mal de main d’œuvre pas chère .. C’est ainsi qu’en 1771, un certain sieur Daudiffret de Barcelonnette, patron d’une fabrique de moulinage de la soie émit l’idée de se charger de 200 enfants lesquels demeureraient chez lui comme apprentis.
Voir sur le site de Histoire P@ssion les articles très fournis et très bien documentés sur l'histoire de l'enfance abandonnée.
Source
Quand la pauvreté était un crime de Françoise Froelhy
Marcel Louis CLAMENS
Marcel est né le 19 décembre 1895 à Muret. Il habite Frouzins en 1915.
Il a les cheveux châtain foncé et les yeux marron, mesure 1.62m et sait lire et écrire.
IL est serrurier en 1914 et chauffeur de taxi en 1928.
Son père s'appelle Jean Joseph et sa mère Marie Mazères
Il contracte un engagement volontaire pour 4 ans le 10 décembre 1914. Il est incorporé au 1er régiment de hussard avec le grade de cavalier de 2ème classe puis est affecté au 4ème régiment de chasseur d'Afrique en 1917. Il sera dirigé sur l'armée d'Orient le 8 février 1918.
Il est envoyé en congé illimité le 16 août 1919.
Il passera au 10è régiment de dragons le 16 avril 1919
Il reçoit la médaille interralliée dite de la victoire, la médaille commémorative d'Orient et la médaille commémorative serbe
Il habite en 1928 au 92 rue Riquet à Toulouse
Médaille commémorative d'Orient